Du 7 au 15 avril : Je suis content de moi et Macron ne me l'enlèvera pas !

 

Commençons avec une vérité : si, à 35 ans, tu n'as toujours pas fait chier un publicitaire, tu as raté ta vie !  

 

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Vendredi 7 avril

 

20h30 : Comme chaque premier vendredi du mois, le Collectif Synergie organise une scène ouverte au Temple du Pharaon. Hélas, ce soir, il y a beaucoup de concurrence en ville et aussi bon nombre d’absences parmi les artistes habitués. Résultat, nous sommes en très petit comité, certes contents de nous retrouver entre créateurs mais frustrés de ne pas avoir plus de deux personnes en guise de public… Tant pis, nous ferons avec, the show must go on ! Si les deux clientes de ce salon de thé et de narguilé prennent du plaisir à nous écouter, ce sera déjà un succès pour nous ! Et tant pis pour le crétin qui, à l’invitation du patron à se faire caricaturer par moi, a osé répondre que ça allait « rester dans un tiroir » ! Il ne s’est pas attardé et tant mieux, je ne travaille pas pour ce genre de blaireau ! 

 

Cette soirée nous aura tout de même réservé une belle découverte : le camarade accordéoniste de Bardawen - qui, physiquement, me rappelle à la fois Charlie Schlingo et un truand mexicain de western "spaghetti" ! 

 

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Ci-dessous, la seule caricature que j'ai vendue ce soir-là, et son heureuse récipiendaire - elle trouve que je la fais ressembler à une sorcière : ça tombe bien, je préfère les magiciennes cultivées et puissantes aux princesses rose bonbon ! 

 

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23h10 : J’ai remonté la rue de Siam en compagnie d’une amie peintre et poétesse. Nous taillons une bavette, elle me parle de ses galères au boulot, mais je suis obligé de la quitter précipitamment pour ne pas rater le bus qui arrive. Je ne culpabilise pas, mais je regrette d’être obligé d’abréger ainsi la conversation et de laisser prématurément seule cette personne qui semble avoir besoin d’être écoutée… On ne peut pas avoir que des jours de gloire !

 

Samedi 8 avril

 

10h30 : J’ai très mal dormi cette nuit : je n’aurai pas dû veiller si tard après mon retour à Lambézellec, mais j’étais impatient de scanner les dessins, trier les photos et monter les vidéos que j’avais ramenées de la scène ouverte, histoire de ne pas rester sur un constat d’échec. Un artiste, c’est quelqu’un qui travaille encore quand le commun des mortels est déjà vautré devant « Touche pas à mon poste » voire blotti sous la couette à rêver à des ébats avec Monica Bellucci ou Margot Robbie (désolé pour celles et ceux qui préfèrent les hommes, aucun exemple ne me vient à l’esprit)… L’art, ce n’est pas un métier de fainéant, mais malheureusement, beaucoup de fainéants croient le contraire et desservent la profession aux yeux de l’opinion.   

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19h : Bon, d’accord, j'étais en tort, j’ai grillé le feu, j’aurais dû céder le passage au cycliste qui arrivait au lieu d’emprunter benoîtement le passage protégé. Mais était-ce une raison pour qu’il me traite de « connard » ? Si vous comptez sur le vélo pour sauver la planète, vous êtes à côté de vos pompes : les cyclistes ne polluent pas, d’accord, mais ça ne les met pas à l’abri d’être aussi cons et agressifs que les automobilistes ! Je ne mets pas tous les cyclistes dans le même sac, loin s’en faut : je prends juste acte du fait que si la bagnole rend con, le vélo ne rend pas intelligent pour autant et ne suffira pas à mettre les hommes à l’abri de se faire la guerre…

 

20h : Me voici au Patronage Laïque Le Gouill pour le « Patro chantant » où les finalistes des tréteaux chantants brestois se sont donné rendez-vous pour interpréter deux chansons chacun, accompagnés au clavier par Patrick Péron qui travailla, entre autres, avec Hervé Vilard – qui n’est toujours pas mort, ma p’tite fille !  J’ai été invité à assister à ce concert pour faire des croquis sur le vif de tous ces chanteurs. Évidemment, la moyenne d’âge est assez élevée, y compris dans l’assistance où je dénombre à peine deux ou trois jeunes filles qui, vraisemblablement, accompagnent au moins un de leurs grands-parents. Mais ne comptez pas sur moi pour railler cette manifestation à l’ambiance chaleureuse et familiale : les interprètes qui se succèdent sur scène sont vraiment doués pour la chanson, ce n’est pas pour rien qu’ils ont été bien classés à un concours, je me suis même subjugué par le talent d’Elisabeth qui passe la première. Ont-ils au moins la faiblesse d’avoir mal choisi les titres qu’ils reprennent ? Même pas, je ne décèle aucune faute de goût majeure et je passe un bon moment. De toute façon, comme j’enquille les croquis à la chaîne, je n’ai pas le loisir de m’ennuyer, je n’ai même pas le temps de lâcher mon carnet pour applaudir. Les témoins de mon marathon graphique sont subjugués par ce que j’arrive à faire en si peu de temps ! J’avoue que je m’étonne moi-même…

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20h35 : J’ai déjà dû croiser au moins une fois chacun des chanteurs, ne serait-ce qu’à l’édition de l’an dernier, mais la seule personne qui m’est vraiment familière est Yvette Lucas, la bretonnante du groupe. La présence de cette femme qui est pour moi une sorte d’amie me réconforte et me met à l’abri du sentiment d’étrangeté quand je ressens dans les soirées où je ne connais personne. Les animateurs disent que son chant est beau même si on ne comprend rien à la langue bretonne : j’ajouterai que ça n’a aucune importance, on peut très bien aimer les chats sans savoir ce que signifie un miaulement ! Et puis si vous croyez que les jeunes qui gambillent sur les chansons de Rihanna (par exemple) comprennent les paroles…

 

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21h10 : Tous les chanteurs amateurs ont effectué un premier passage : avant l’entracte et la seconde partie, nous avons droit à un tour de chant de l’animateur historique des tréteaux chantants, l’excellent Yvon Étienne. J’écoute ses chansons depuis longtemps, mais je n’avais encore jamais eu l’occasion de l’écouter sur scène en solo, je ne l’avais vu qu’avec les Goristes. Il n’a plus grand’ chose sur le caillou, mais il a toujours autant de talent et il est toujours aussi drôle ! Cela dit, on ne voit souvent en lui qu’un gros rigolo, mais il n’est pas que ça. Si « La jolie Rochelle » est à la hauteur de cette réputation (qui n’a, il est vrai, rien de déshonorant), « La couleur des fleurs », qui est clairement une chansons anti-xénophobie, et « Liberta », qui a été écrite au Corse Dominique Gambini, montrent qu’il est autant un tendre qu’un gros rigolo. Et même quand il fait rire, il n’est jamais débilitant, il y a toujours un fond, une volonté d’exprimer quelque chose d’important : c’est un humoriste, pas un amuseur, c’est ce qui fait toute la différence entre lui et Carlos ou Patrick Sébastien, c’est surtout ce qui fait, depuis déjà longtemps, son succès auprès d’un public populaire mais exigeant. C’est drôle, j’ai l’impression de parler de Pierre Perret ! Pas étonnant : il parait que « La couleurs des fleurs » s’est retrouvée juste derrière « Lily » dans un classement de chansons francophones antiracistes… On a vu plus humiliant, non ? 

 

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21h40 : Yvon Étienne a quitté la scène : avant de laisser sortir les fumeurs, les animateurs nous offrent un petit numéro comique avec l’amie Yolande déguisée en cantatrice à la poitrine hypertrophiée ! Bien entendu, son chant rappelle davantage la craie qui crisse que la Callas, et les « vrais » chanteurs, qui ont regagné leur place dans l’assistance et sont bien entendu dans le coup, lui balancent les fruits et légumes en plastique qui leur ont été préalablement distribues, ce que la « Diva » interprète comme des preuves d’amour ! Quand elle enlève sa robe de Castafiore de Prisunic, révélant ainsi qu’elle portait un soutien-gorge au bonnet Z (au moins !) sur ses « vrais » habits, le fou rire du public frise l’apoplexie ! Elle n’a pourtant pas l’air plus con que les super-héros avec leurs slips par-dessus le pantalon… En tout cas, si je vais trouver un « message » caché derrière ce sketch, ce serait celui-là : « Nous sommes des chanteurs populaires, nous n’avons pas la prétention d’égaler les rossignols de la Scala de Milan, mais nous avons toutes les qualités que les divas imbues d’elles-mêmes n’aurons jamais ! » Choisis ton camp, camarade, et n’aie pas de scrupules : il n’y pas de honte à vibrer davantage avec du Brel qu’avec du Wagner et certains opéras prestigieux n’en sont pas moins des monuments de conneries, ne citons que celui, tristement célèbre, de Bizet qui s’est imposé en tant que pièce maîtresse de la mythologie surfaite entourant cette barbarie d’un autre temps que l’on appelle corrida, et qui a été déjà si bien épinglé en son temps par le grand Cavanna :

 

« Carmen, minable musiquette de bastringue bricolée sur une anecdote d’un sordide fait divers, « opéra le plus joué dans le monde » – pardi, c’est le plus con ! – Carmen, que de mal tu auras fait, triste pute, en réinjectant dans les crânes épais qui n’y pensaient plus la fascination sordide de la corrida ! »[1] 

 

L’un des chanteurs nous a interprété « La corrida » de Francis Cabrel… J’aime le peuple quand il montre qu’il peut être moins con que les riches.

 

 

21h55 : Mettant à profit l’entracte, je prends la direction de la station de bus afin de m’assurer que le dernier bus en direction de Lambé part suffisamment tard pour m’éviter de partir avant la fin. Évidemment, je ne peux pas faire trois pas sans qu’on demande à voir mes croquis : je ne proteste pas, ça fait partie du jeu. Pierre, le grand ordonnateur de cette soirée, tient même à me présenter à Yvon Étienne : celui-ci se dit admiratif de ce que je fais, ajoutant qu’il serait incapable de dessiner. Je lui réponds que pour ma part, je chante comme un naze : à chacun sa spécialité, non ? Je finis tout de même par pouvoir atteindre l’arrêt de bus, non sans avoir confié mon carnet à un groupe réuni à la sortie du bâtiment.

 

22h15 : Le concert reprend, chacun des dix chanteurs de la première partie repasse sur scène, dans le même ordre. Première faute de goût de la soirée : la merveilleuse Elisabeth gâche sa voix d’or en interprétant… « Libérée, délivrée », la chanson de La reine des neiges ! Je crois comprendre que c’est pour faire plaisir à la demoiselle (sa petite-fille ?) qui l’accompagne : ce n’est pas ça qui va arranger le fossé des générations ! Je suis à deux doigts de mettre mon casque anti-bruit, mais je n’en ai pas le loisir : le temps pour moi de finir mon croquis, elle a déjà presque terminé de chanter ! Je ne redirai jamais à quel point le dessin m’aide à surmonter des moments difficiles, même si je dois convenir qu’avec la voix d’Elisabeth, cette rengaine sirupeuse est presque supportable. Il n’empêche qu’elle se sent obligée de s’excuser… Vous êtes toute pardonnée ! Mais il y a assez de chansons Disney plus supportables pour nous épargner ce tube que je qualifierais de… Supercalifragilisticexaspérant !

 

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22h45 : Seconde faute de goût de la soirée : une femme, brune opulente visiblement pleine de joie de vivre, qui avait repris « Les enfants du Pirée » en première partie, nous revient avec une chanson… De Mireille Mathieu ! Autant je peux admettre (sans vraiment approuver) qu’on puisse apprécier Dalida, autant je ne connais aucune personne saine d’esprit capable de supporter plus d’une demi-seconde la voix et les chansons de la « naine avec l’accent du midi qui se prend pour Édith Piaf » (pour reprendre l’expression bienvenue d’Antoine de Caunes et Laurent Chalumeau) ! En tout, ça fait deux fautes de goût sur un spectacle de plus de deux heures où plus de vingt-cinq chansons auront été entendues : autant dire une goutte d’eau dans l’Océan ! On peut passer outre ! De toute façon, vingt minutes plus tard, l’ami Gilles fait oublier tout ça avec son interprétation impeccable du « barbier de Belleville » de Serge Reggiani… Il n’y a pas si longtemps encore, j’avais eu droit à une autre reprise de Reggiani par Miika Bjørn : dois-je en conclure que le « Rital » redevient à la mode ? Ce serait justice, c’était un grand chanteur.

 

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23h30 : C’est fini pour aujourd’hui, les chanteurs ont bouclé la soirée avec deux chansons interprétée en chœur. Ça s’est si bien passé que je me promets de revenir demain après-midi, où une seconde représentation est prévue avec d’autres chanteurs. Les réactions suscitées par mes instantanés graphiques sont si enthousiastes que je sens mon estime de moi gonflée à bloc ! Ça m’aide à supporter le fait de devoir attendre le bus dans le froid nocturne pendant une demi-heure…

 

Dimanche 9 avril

 

10h45 : Je me suis couché le ventre vide hier soir : j’étais ravi mais épuisé, entre autres à cause de la mauvaise nuit passée la veille. Aujourd’hui, je suis bien décidé à participer à la chasse aux œufs organisée par le Secours Populaire au bois de Keroual avant de retrouver le Patro chantant. La journée commence mal : à l’arrêt où je dois attraper la correspondance pour Guilers, je monte machinalement dans le bus pour Lambézellec ! Heureusement que je m’en suis aperçu à temps et que je suis tombé sur un chauffeur suffisamment compréhensif pour me laisser descendre au premier feu rouge : le « bon » bus arrive moins de cinq minutes plus tard…

 

11h : Au niveau de Penfeld, le bus se vide d’un coup des familles qui l’empruntaient. Je me souviens vaguement qu’il est possible d’accéder au bois de Keroual à cet endroit : je descends, mais je ne vois que des banderoles annonçant une course de solex ! Craignant de ne pas trouver mon chemin alors que le temps m’est compté, je préfère remonter dans le bus : le chauffeur, cette fois, rechigne, mais se laisse finalement convaincre. Je continue donc ma route, non sans maugréer contre les imbéciles qui croient intelligent de passer leur week-end pascal à des loisirs aussi imbéciles que des courses de solex… Pourquoi pas des courses à dos d’autruche, tant qu’on y est ! Quoi ? Ça existe aussi ? Mais quel monde de cons… 

 

11h15 : Je descends à Guilers, derrière la mairie, où je retrouve la route que j’avais jadis l’habitude de prendre pour aller au bois. Malgré l’heure méridienne, il y a beaucoup de familles qui prennent la même direction : je suis surtout effaré par le nombre de voitures qui sont déjà sur le parking… Je suis prêt à parier qu’au moins la moitié de ces véhicules appartiennent à des gens qui habitent à Guilers ! Prise de conscience écologique, mon œil ! Leurs maisons seraient submergées par la montée des eaux, ils exigeraient encore d’être transportés dans des bateaux à moteur diesel…  

 

Puisqu'on parle de Guilers, voici deux pointes sur le maire de cette commune, vértiable caricature du politicien local bête et méchant :

 

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11h30 : J’arrive enfin au niveau du manoir de Keroual où la chasse aux œufs est organisée : il y a énormément de monde, il y a au moins six files d’attente pour avoir un ticket ! Heureusement, j’ai mes albums de Jojo pour prendre mon mal en patience. Quand mon tour arrive enfin, je tombe sur une dame peu loquace qui me donne mon ticket sans la moindre explication et je reste comme deux ronds de flanc devant ce bout de papier avec quatre cases à remplir… Je me permets de déranger sa voisine qui m’explique que l’organisation a changé par rapport aux éditions précédentes : la chasse aux œufs proprement dite est réservée aux petits enfants, les enfants les plus âgés et les adultes participant à un jeu d’exploration dont les règles me seront expliquées à un autre stand… Le bruit, la foule, la chaleur et la nouveauté qui me désarçonne : je suis déjà à deux doigts de foutre le camp ! En même temps, ce serait trop bête d’avoir fait tout ce chemin, d’avoir fait la queue et d’avoir dépensé quatre euros pour des prunes… Je m’achète une saucisse grillée pour caler mon estomac vide et en profiter pour peser le pour et le contre.

 

12h : Manger porte conseil. Tout bien réfléchi, je me dis que ce serait stupide de baisser les bras si vite : je me renseigne donc au stand des « explorateurs », où l’on m’explique que je dois trouver quatre numéros, situés chacun à des endroits précis du bois dont les photos sont affichées sur la toile du stand. Le bénévole qui m’accueille m’exhorte à prendre un cliché de ces clichés (vous suivez ?) pour que je puisse repérer les lieux en question : heureusement que j’ai mon appareil photo sur moi… Encore une trace de la civilisation du « smartphone pour tous » ! Je trouve ça d’autant plus regrettable qu’en principe, si on organise ce genre d’événement dans un cadre champêtre, c’est justement, entre autres, pour déconnecter des écrans, non ?

 

12h45 : J’ai eu un peu de mal à trouver tous les lieux indiqués : le dernier, un gros arbre, était bien planqué derrière de grands sapins. Mais bon, j’ai tous les numéros, je n’ai plus qu’à me diriger vers le stand où l’on peut retirer les lots. Sur le chemin, une heureuse surprise m’attend : un couple d’amis avec leur petite fille et un autre ami avec ses deux enfants ! Je me joins à eux, assis dans l’herbe, pour tailler le bout de gras et profiter de la présence de leurs charmants bambins pleins de caractère. Rien que pour ça, je ne serai pas venu pour rien !

 

13h : La file pour retirer le stand des lots est très longue. Derrière moi, une famille de cas sociaux me tape sur les nerfs avec sa conversation minable. Je suis trop couvert, donc j’ai chaud, le soleil m’illumine, l’attente me lime les pieds… Bref, tous les ingrédients sont réunis pour que j’aie une crise à la première étincelle. Ça ne rate pas : l’un des « kassos » prononce le mot « détendre » ! Le champ lexical de la relaxation m’a toujours agacé, surtout si on l’emploie dans un contexte où je n’ai nulle envie de me calmer ! Je pousse un cri : évidemment, celui qui a l’air d’être le chef de cette famille de dégénérés me demande si j’ai un « problème » ; je lui réponds franchement par l’affirmative ! Je n’ose cependant pas lui dire que je suis autiste, me doutant qu’il ne pourrait même pas comprendre ce que ça veut dire, point de vue partagé par la dame qui est devant moi, dont le fils est lui-même en situation de handicap et qui avait compris que j’étais Asperger. C’est bizarre : j’ai eu une crise, ça a causé une altercation, et pourtant, je ne culpabilise pas ! Sans doute parce que je suis trop content d’avoir rencontré quelqu’un qui connait le syndrome d’Asperger et comprend ce que ça représente en société… Ce n’est pas encore si courant que ça, hélas !

 

13h30 : J’ai quand même fini par récupérer mon lot : une boîte de bouchées au chocolat fourrées à la framboise ou au caramel – non, je ne dirai pas la marque. Au prix du ticket, je suis largement gagnant. Avant de repartir, comme je n’ai pas beaucoup mangé et que j’ai eu quelques émotions fortes, une crêpe m’aurait bien tenté ! Malheureusement, la queue au stand est longue et il y a beaucoup de gens qui commandent pour une famille entière : la peur de rater mon bus (dans les communes périphériques, il n’y en a qu’un toutes les heures, le dimanche !) entame sérieusement ma patience… Ayant eu mon compte de files d’attente pour la journée, je préfère partir, histoire de ne pas me sentir obligé de presser le pas.

 

Croquis réalisé en attendant le bus : on s'occupe comme on peut !

 

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15h30 : Retour au patro chantant ; les organisateurs sont toujours aussi contents de me voir arriver, je suis accueilli comme une petite vedette. Pierre co-anime l’après-midi avec Yolande, coiffé d’une perruque qui me rappelle Hervé Vilard (encore lui ?) : ça fait peur, un peu… Toujours peu de faute de goût majeure parmi les choix de reprise, excepté « Emmenez-moi » ! Non seulement j’ai toujours détesté Aznavour, qui trouvait le moyen d’être infect même quand il écrivait une bonne chanson, mais j’exècre particulièrement ce texte débile : non, la misère n’est pas moins pénible au soleil, il est même très désagréable de sentir que les éléments ne sont pas au diapason de votre malheur, que la nature vous exhorte à être heureux alors que vous n’avez aucune raison de l’être. Enfin, ne chipotons pas, c’est bien la seule chanson qui me déplait vraiment sur la grosse vingtaine qui est interprétée aujourd’hui…

 

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16h30 : Yvon Étienne revient sur scène, pour faire à peu près le même numéro qu’hier, mis à part une chanson de Font et Val[2] sur une vieille dame indigne. Tant pis pour la redite, on ne se lasse pas de ses chansons ! Pour faire un trait d’humour dont il a le secret, il dit avoir essayé la perruque de Pierre… Mais que ça le faisait ressembler à Bernadette Malgorn ! J’ai un peu de mal à croire à ça : « Bernie la matraque » a plus de moustache que lui !

 

Le problème, avec Yvon Etienne, c'est que j'ai toujours l'impression de lui dessiner une petite guitare... Heureusement qu'il ne joue pas du ukulélé !

 

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17h : Je profite de l’entracte pour déclamer à Yvon Étienne mon slam sur Bernadette Malgorn. Il l’apprécie, ce qui, venant de lui, me touche, bien entendu. Il me raconte une anecdote sur cette dame que ni lui ni moi n’apprécions beaucoup : un jour, lors de la réunion du conseil municipal de Brest, elle a reproché au maire d’avoir signé le permis de construire pour l’extension du Leclerc de Kergaradec, elle a sorti son couplet galvaudé sur le petit commerce brestois qu’on fait mourir… Mais monsieur Cuillandre n’a pas eu de mal à lui répondre : il lui a rappelé que le permis de construire n’a pas été signé par lui mais par le maire de la commune concernée, donc celui de Gouesnou, lequel, qui plus est, est du même bord politique qu’elle ! La prochaine fois qu’on me demandera de lâcher la grappe à madame Malgorn, je répondrai que je voudrais bien arrêter mais que c’est elle qui n’arrête pas : ce n’est pas de ma faute si elle ne rate pas une occasion de montrer toute l’étendue de sa bêtise et de sa méchanceté ! Je m’étonne que Macron ne l’ait pas déjà nommée ministre…

 

 

17h35 : Le spectacle reprend et me ménage une bonne surprise : l’une des chanteuses a eu l’heureuse idée de reprendre « Le jardin extraordinaire » de Charles Trenet, une de mes chansons préférées de ce grand monsieur de la chanson ! Elle se trompe un peu dans les paroles, mais elle retombe bien sur ses pattes, offrant un bel hommage à ce « grand Charles » sans uniforme qui n’avait rien à envier à l’autre : libertaire, pacifiste et écologiste avant l’heure, monsieur Trenet continuera à enchanter des générations de mélomanes quand Tino Rossi et Maurice Chevalier seront tombés dans un oubli mérité ! Du moins je l’espère…

 

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19h : Tout à la joie de mes satisfactions de la journée, je descends à la friterie pour dîner. Une heureuse surprise m’attend : un vieil ami, conteur de son état, y est lui-même attablé ! Décidément, c’est la journée des retrouvailles ! Il semble de bonne humeur, malgré les épreuves que lui ont réservé la vie, à savoir une maladie qui l’a privé de toute activité et a mis sa carrière artistique à l’arrêt pendant quelques mois et, par-dessus le marché, une séparation… Il est visiblement en train de se reconstruire. J’admire son pouvoir de résilience, mais je mesure aussi à quel point la vie d’artiste est à la merci de certains aléas ! Et entre le pouvoir qui nous catalogue « non essentiels », les terroristes qui nous tirent dessus et les contestataires qui souillent les œuvres dans les musées, ça n’est pas parti pour s’arranger… Un homme, attablé juste à côté de nous, finit par se lever mais, avant de partir, nous remercie pour notre conversation, déclarant qu’il s’est régalé à nous écouter ! Mon camarade et moi-même devrions faire payer le droit d’écouter nos discussions…

 

21h : Je rentre au bercail, content de moi : toutes les satisfactions de ces deniers jours m'ont prendre conscience du fait que je suis un garçon attachant, cultivé, intelligent, talentueux, travailleur, persévérant, passionné, généreux, réactif, efficace, attentif, curieux, organisé, fidèle en amitié et intéressant à écouter. Vous trouvez que j’ai la grosse tête ? Je vous emmerde !

 

Lundi 10 avril

 

17h30 : J’ai un peu traîné des pieds, ce lundi de Pâques : je me suis borné à paresser entre deux tâches urgentes à exécuter. Avant de dîner, je m’offre une brève sortie au bois situé en face de chez moi : météo maussade oblige, il y a peu de promeneurs, et ça me fait un bien fou. J’ai une révélation : je me rends compte que j’en ai ras le bol de démarrer chaque journée en allumant mon ordinateur et que ça me coupe les jambes plus qu’autre chose ! Or, je commence à être sollicité en tant que dessinateur, il serait donc grand temps que j’adopte des habitudes plus motivantes… Et si je faisais un tour au bois chaque matin, du moins quand je n’ai pas d’autre raison de sortir de chez moi ?

 

Mardi 11 avril

 

10h : Comme prévu, je ressors faire une marche d’une demi-heure au bois : en rentrant, je suis suffisamment motivé pour retravailler le crayonné d’une BD de deux pages et fournir une page histoire à Côté Brest ! Le test est concluant, c’est une bonne habitude à prendre, d’autant qu’elle me permettra d’exploiter pleinement ma rapidité d’exécution dont j’ai pris pleinement conscience grâce au Patro chantant… J’entre peut-être dans la période la plus créative de ma « carrière » !

 

Mercredi 12 avril

 

20h30 : Quand les autres élèves du cours du soir m’ont parlé d’une « tempête », je croyais qu’ils exagéraient, même si je reconnaissais que le vent était un peu fort. Mais au Biorek brestois, le petit Alex me confirme que c’est bien de ça qu’il s’agit ! Il est même obligé de bloquer sa porte avec un tabouret : je me dis que ce n’est pas l’idéal pour attirer le client, les passants pourraient penser qu’il est fermé. D’un autre côté, un soir de tempête, il risque de ne pas y avoir beaucoup de passants…

 

Jeudi 13 avril

 

18h30 : Je ne comptais pas sortir en ville aujourd’hui ; finalement, j’y ai été contraint, entre autres parce que les cartouches de mon imprimante, que j’avais réussi à maintenir en état de survie artificielle jusqu’à présent, sont bel et bien vides et que j’ai absolument besoin de terminer l’impression de quelques documents. La manif est finie depuis longtemps, mais les bus sont toujours en grève, à raison d’un toutes les vingt minutes sur la ligne que j’ai l’habitude d’emprunter… Le retour est donc laborieux, d’autant que j’ai le malheur de partir en pleine heure de pointe et que le moteur du véhicule cale au moins trois fois ! Heureusement que je suis de bonne humeur en ce moment, mais voilà donc tout ce que j’aurai connu d’un mouvement de protestation qui laissera sûrement des souvenirs exaltants à ceux qui y auront participé ! Ils auront au moins eu la fierté de se battre pour la justice sociale, là où les « Gilets jaunes » avaient lutté, au départ, pour le droit de polluer… Pour ma part, je vais donc mourir idiot, mais après tout, combien de Français ont-ils connu Mai 68 sans se sentir (à tort ou à raison) concernés ?

 

Sans rapport : un cosmonaute breton plantant le Gwenn ah Du sur Mars - j'ai eu l'idée en entendant le fils d'une amie parler de son ambition de devenir cosmonaute ! Il a un peu changé d'idée depuis...

 

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Vendredi 14 avril

 

15h : Me voici à Guilers, cette fois chez mes parents. Pourquoi ? Parce qu’une amie a eu la bonne idée de m’inviter à assister au concert du groupe de son nouveau fiancé, qui joue ce soir à l’espace Jean Mobian : c’était donc aussi simple de profiter du passage hebdomadaire de ma mère à mon domicile puis de dormir sur place pour ne pas m’embêter avec les transports en commun… J’en profite pour ressortir des étagères quelques vieux recueils de Spirou afin d’y retrouver des épisodes de Jojo, la série du regretté André Geerts dont je n’ai pas encore tous les albums : j’ai largement atteint l’âge d’être le père de ce sympathique petit bonhomme à casquette (son plombier de père doit être à peine plus âgé que moi), mais je n’ai pas honte d’être resté fidèle à cette bande dessinée qui parle de l’enfance avec justesse, sans l’idéaliser ni la noircir. Geerts montrait à quel point les enfants pouvaient être cruels entre eux et évoquait volontiers les épreuves que le destin peut leur faire prématurément subir (opération chirurgicale, mort prématurée d’un parent, etc.), mais il faisait avec une telle grâce, une telle délicatesse, qu’on ne peut pas être choqué : Jojo peut dire les pires grossièretés, jouer les tours les plus pendables à ses aînés voire pénétrer dans le bar à hôtesses tenu par sa grand’ tante, il n’est jamais vulgaire ! Au pire, on rit du décalage entre sa candeur juvénile et les situations dans lesquelles son créateur le plonge, au mieux, on a une larme parce qu’on s’identifie facilement à lui. Je n’ai pas honte de retomber en enfance en relisant ses aventures : et puis la maison où j’ai grandi est le lieu idéal pour ça, non ? Sans compter qu’avec des parents en (assez) bonne santé et toujours disposés à m’accueillir, je peux encore me le permettre… Merci, monsieur Geerts ! Quel dommage que vous soyez parti si tôt…

 

 

18h : Le conseil constitutionnel a validé la réforme des retraites. Je n’en suis pas étonné : Macron a agi de manière scélérate, mais à aucun moment il n’a enfreint les règles de la constitution. Qu’est-ce que ça signifie ? Que la constitution elle-même est scélérate, bien sûr ! Comment pourrait-il en aller autrement de la part d’une constitution rédigée par un crétin réactionnaire, militariste et idolâtre (Michel Debré) dans le but exclusif de satisfaire les ambitions de son Général bien-aimé ? Pas étonnant qu’elle déclenche des aberrations quand le pouvoir tombe dans les mains d’un individu dont la hauteur de vue n’égale pas, il faut bien le dire, celle de l’homme du 18 juin… Mais ne pensez pas trop vite que l’avenir politique de Macron est désormais bouché : il n’y a pas un an qu’il a été réélu, il lui reste encore quatre ans de présidence au cours desquelles bien des choses peuvent arriver (qui aurait pu prévoir la crise sanitaire et la guerre en Ukraine, à quatre ans des dernières présidentielles ?) et, surtout, il est encore jeune : 45 ans ! En tant que chef d’État, il a encore toute la vie devant lui ! Pourquoi croyez-vous qu’il s’est permis aussi tôt une réforme qui ne pouvait ne pas être impopulaire si ce n’est parce qu’il sait que le temps est de son côté ? Vous me direz qu’il pourrait en être réduit à dissoudre l’assemblée ? Allons ! La cohabitation, ça a plutôt bien réussi à ses prédécesseurs ! Il ne nous le dira jamais, mais ça l’arrangerait plutôt qu’autre chose, de pouvoir décrédibiliser ses adversaires… Notez que ça ne me fait pas du tout plaisir de vous dire ça ! Mais ça m’étonnerait aussi que la colère s’éteigne dans les jours à venir : le ressentiment est énorme, les gens ont de moins en moins à perdre, les syndicats ont repris du poil de la bête… Je ne serais pas surpris que l’agitation sociale rebondisse ! Bref, l’avenir est plus qu’incertain : je ne vais pas sortir de sitôt de ma tour d’ivoire… Et j’espère surtout qu’il n’y aura plus de second tour Macron-Le Pen car je pense que j’aurai du mal à expliquer aux gens qu’il faudra voter contre l’extrême-droite pour sauvegarder leurs libertés !

 

Il parait que certaines entreprises ont du mal à recruter : ça ne va pas s'arranger...

 

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19h10 : Le concert a déjà commencé, avec la prestation du GONG (Guilers Orchestra New Groove). Je m’étonne de ne pas avoir déjà vu mon amie, même si je sais que les horaires la stressent moins que moi – davantage, ce serait difficile ! Elle arrive enfin, accompagnée de son fils, un bel adolescent taciturne, et, surtout, de son nouveau fiancé, qui joue dans le second groupe qui doit se produire ce soir, le FAT (là, je ne sais pas ce que ça veut dire). Elle s’explique qu’elle a été retardée parce qu’elle a dû laver au dernier moment la tête de son fils… Qui avait attrapé des poux ! Je ne peux m’empêcher de repenser à ce qu’écrivait Cavanna en 1991 :

 

« Quand j’étais tout môme, les poux, ils appartenaient à la mythologie, comme les loups et les dragons cracheurs de feu. On aurait plutôt trouvé un loup-garou dans le bois de Vincennes qu’un pou sur la tête d’un enfant, même très pauvre ! Des fois, je tombais sur un vieux journal des années moustachues, j’y voyais une réclame pour la « Marie-Rose », « La mort parfumée des poux », j’appelais les copains, ça nous faisait marrer presque autant que les pilules pour faire revenir les règles qu’on trouvait dans les mêmes journaux. Enfin, vous qui êtes sensibles à la symbolique des choses, vous voyez sûrement ce que je veux dire : cette invention inouïe, la télévision, pour vendre un truc à tuer les poux… »[3]

 

Oui, je vois ce que vous vouliez dire, monsieur Cavanna. Je peux même ajouter qu’aujourd’hui, alors qu’on trouve dans la seconde des milliards pour financer un vaccin contre un virus qui n’est mortel que dans une infime proportion des cas et qu’on dispose d’engins qui mettent tout le savoir du monde à portée de main, on trouve encore des poux sur la tête de l’enfant d’une femme qui est propriétaire de sa maison, et qu’on trouve même des rats dans le hall d’une immeuble neuf dans une grande ville ! Le progrès à deux vitesses, ça ne s’est pas arrangé, trente ans après votre constat et dix après votre mort ! Je pourrais écrire « Revenez, ils sont devenus fous », mais non, vous aviez compris qu’ils l’ont toujours été, et puis si vous pouviez revenir parmi nous, même si vous avez écrit Stop-crève, vous ne voudriez sûrement pas rester… 

 

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20h : C’est au tour du FAT de jouer : le nouveau fiancé de mon amie (il a bien de la chance d’avoir conquis le cœur d’une si jolie femme) est batteur au sein de ce « groupe cuivré aux accents funk, jazz, rock festif ». Sincèrement, je passe un bon moment, d’autant que ça me donne l’occasion de m’exercer à dessiner des musiciens jouant des instruments à cuivre, ça me change des sempiternels guitaristes…

 

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21h10 : Le concert est déjà fini, je reste quand même quelques minutes pour profiter de la présence de ma délicieuse amie et lier connaissance avec son nouveau fiancé qui est un batteur talentueux et s’avère bien sympathique. Je retrouve ainsi un homme que j’ai connu quand il travaillait encore à Guilers : il me demande des nouvelles de ma famille, et notamment de mon frère. Ne sachant comment lui annoncer plus clairement que ce dernier s’assume désormais en tant que femme transgenre, je lui dis que « Benjamin est devenu Bénédicte ». Il me répond : « Ah, il est entré dans les ordres ? » Je ne sais pas s’il me fait une blague ou si j’ai mal prononcé… Mais pour croire qu’un membre de ma famille pourrait devenir religieux, il faut bien mal la connaître !

 

21h30 : Heureusement que mes parents n’habitent pas loin de l’espace Jean Mobian : je dois reconnaître qu’il n’est pas très agréable de rester dehors le soir par ce mois d’avril pourri, surtout à deux pas de ces pavillons où les lumières sont encore allumées, laissant entrevoir au promeneur attardé et transi de froid que certains de ses semblables finissent la soirée à l’abri du froid, dans un chaud cocon familier, en compagnie de ceux qu’ils aiment… Bref, ces félicités domestiques, je les goûte à mon tour avec les auteurs de mes jours devant N’oubliez pas les paroles : ce soir, c’est le « tournoi des maestros ». Je ne suis pas un fou des blagues de Nagui, mais il est encore à cent pieds au-dessus de la plupart des animateurs qui sévissent aujourd’hui sur « l’étrange lucarne » et je ne renie pas qu’il a fait rire l’enfant que j’étais à l’époque de la « brosse à dents ». Quant à l’émission en tant que telle, quitte à voir des inconnus acquérir un certain niveau de notoriété, je préfère que ce soit en chantant et en faisant montre de leur culture générale (car connaître par cœur les paroles d’une chanson, on ne peut pas dire le contraire, c’est avoir une certaine culture) plutôt qu’en s’exhibant en maillot de bain comme les bellâtres et les pétasses de la télé-réalité… Bref, regarder cette émission de divertissement en compagnie de mes chers parents n’est pas la façon la plus détestable de terminer la journée, bien au contraire, même si j’ai bien conscience que je ne regarderais pas ça tout seul et même si je n’apprécie pas toutes les chansons interprétées : quand les candidats doivent chanter du Balavoine, je ne fais aucun commentaire pour ne pas allumer de conflit avec ma mère qui ne partage pas le dédain que m’inspire l’œuvre de cet auteur-compositeur-interprète. Je suis de bonne humeur et j’ai le vent en poupe, je ne vais pas tout gâcher à cause d’un chanteur qui n’en vaut pas la peine, non ?

Puisqu'on parle de télé (c'est la première fois que je dessine Camille Combal) :

 

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Samedi 15 avril : il ya 571 ans naissait Léonard de Vinci

 

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12h30 : Après une bonne nuit de sommeil, mon père m’a reconduit jusqu’à mes pénates. Je n’y suis pas resté longtemps, juste le temps d’y déposer mes affaires et de repartir pour Saint-Martin, plus précisément à L’œil du citron, espace de création poétique ou artistique où Slamity Jane donne la première de son spectacle consacré aux violences faites aux femmes et à leurs combats pour leurs droits : j’ai ainsi l’occasion de découvrir ce lieu un peu spécial dont on m’avait souvent parlé mais où je n’avais encore jamais osé m’arrêter. Slamity se produit dans la vitrine, le public la regarde donc depuis l’extérieur : les responsables de L’œil du citron ont installé des bancs avec des couvertures, mais certains spectateurs préfèrent suivre le spectacle depuis le trottoir d’en face pour pouvoir être au soleil ! Heureusement que la slameuse a la voix qui porte, comme Dalida ! La comparaison s’arrête d’ailleurs là : autant je trouve Iolanda Gigliotti risible malgré sa fin tragique, autant Claire Morin m’émeut. Ses textes sont forts et parlent magnifiquement de ce qu’endurent les femmes bafouées, méprisées, battues ou violées, ils n’ont même pas l’inconvénient d’être agressifs envers les hommes – sauf pour les cons, bien sûr. Je verse quelques larmes et je suis fier d’être ami avec une si grande artiste…

 

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Voilà, c'est tout pour cette semaine, à la prochaine !



[1] CAVANNA François, Coups de sang, Belfond, Paris, 1991, p. 17.

[2] Ce n’est pas parce que ces deux chansonniers ont mal tourné chacun à leur façon qu’il faut oublier tout le plaisir qu’ils nous ont apporté et qu’ils nous apportent encore quand on prend la peine de réécouter leurs chansons.

[3] CAVANNA François, Coups de sang, Belfond, Paris, 1991, p. 238-239.



15/04/2023
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