Du 6 au 12 septembre : Lecornu, démission ! Quatre jours, ça suffit !
Samedi 6 septembre : il y a 376 ans naissait Louise de Keroual
On raconte que quand le roi Charles II d'Angleterre vit pour la première fois cette belle bretonne qui faisait partie de la suite de sa sœur, sa majesté aurait eu une réaction assez peu éloignée de celle du loup de Tex Avery...
15h45 : Plus que deux fois dormir et je réintègre mon appartement… Si, d’ici là, mes bouffées d’angoisse ne m’ont pas terrassé ! En attendant, je mesure l’ampleur de la détresse dans laquelle la mort de mon père m’a plongé : j’ai la sensation d’errer dans la maison, sans savoir que faire ni où aller ; je l’ai souvent éprouvée dans mon enfance, mais je ne pensais pas que je la connaitrais à nouveau à mon âge… Quand j’étais arrivé pour finir mes vacances, j’avais retrouvé ma mère fidèle à elle-même, pleine de vie et de joie : depuis le jour du drame, elle a vieilli de dix ans, tel le capitaine Haddock dans Les sept boules de cristal. Si j’étais optimiste, je dirais que comme elle en avait vingt dans sa tête, ça ne lui fait jamais que trente ans, mais tout de même… Elle pleure de moins en moins, c’est déjà ça, mais elle persiste à dire qu’elle n’a plus de vie sans son mari : d’après ma meilleure amie, la seule chose à faire est d’attendre que ça lui passe… Je n’avais jamais vraiment su qu’elle était malheureuse avant de connaître l’homme de sa vie : le bon côté, c’est que comme l’avoir-été est ineffaçable, sa nouvelle vie ne pourra pas ressembler à celle qu’elle menait avant son mariage ; voilà ce que je lui dirais si elle était réceptive à des arguments destinés à lui rendre espoir… Mais j’en doute pour l’instant. De toute façon, j’ai déjà beaucoup donné et j’ai mon propre deuil à faire, il est temps que je rentre chez moi : mais j’ai peur de l’état dans lequel nous nous retrouverons, chacun de notre côté, quand nous nous serons séparés lundi prochain…
Un dessin aux crayons de couleur, exprimant mon besoin d'espoir, de beauté et de lumière :
16h30 : Ma mère, apparemment reposée, propose que nous mettions du vin en bouteille : je ne l’avais encore jamais fait ! Cette opération faisait partie du domaine réservé de Papa, c’est la première fois que j’y prends une part active ET qu’un tiers prend la peine de m’expliquer comment faire ! Maman remplit les bouteilles, je les bouche : je n’avais jamais manié la boucheuse et je me surprends à trouver terriblement facile cette opération que je croyais presque magique au temps où mon père se la réservait… « Le rite qui nous envoûte s’avère alors anodin » dirait le grand Georges. Je réalise que Papa m’a toujours impressionné, que je n’ai jamais vraiment réussi à lui parler d’égal à égal comme le font mes cousins avec leurs pères respectifs : un psychanalyste de bazar dirait que je n’ai pas fait mon Œdipe… De fait, je n’ai pas eu à tuer le père, la nature s’en est chargée à ma place ! J’en arrive à être presque reconnaissant envers mon père de ne pas avoir vécu assez vieux pour devenir un grabataire qui fait sous lui : je n’aurais pas supporté d’assister à une telle déchéance…
Un dessin à l'encre, représentant Trémière et Déodat, le couple du Riquet à la houppe d'Amélie Nothomb, par lequel j'exprime mon besoin d'amour et de tendresse :
22h : Ça y est ! Grâce à ma fée bienfaisante de mère, j’ai enfin pu voir jusqu’à la fin la cinquième saison d’Astrid et Raphaëlle. Je ne vais pas vous raconter comment elle se termine, mais j’aimerais revenir sur l’interprétation de Stéphane Guillon dans le rôle de l’abominable Alain Lamarck, l’ennemi juré d’Astrid, qui revient dans le dernier épisode. J’avoue n’avoir jamais trop aimé Guillon en tant que billettiste, j’avais tendance à le mettre dans le même sac qu’Ardisson et Baffie voire Séguéla et Beigbeder ; je veux dire qu’il faisait partie, à mes yeux, de ces gougnafiers qui ne sont certes dénués ni de talent ni d’esprit mais les mettent au service de leur ego et de leur gloire au détriment de toute autre considération : ils pratiquent l’impertinence et la provocation non pas parce qu’ils ont des colères et des indignations à exprimer, comme Cavanna, mais parce qu’ils veulent se faire remarquer à tout prix. Un imbécile, dont le nom n’est pas digne pas d’être cité ici, a fait de Guillon un martyr de la liberté d’expression et je reste convaincu que ce dernier ne méritait pas d’être viré de France Inter, mais sa carrière d’humoriste ne m’en laisse pas moins le souvenir d’un individu prétentieux, hypocrite, foncièrement malveillant et toujours prêt à écraser plus faible que lui. Ceci pour dire : il n’y aucun doute, le rôle de Lamarck, cet écrivain dévoyé, manipulateur, orgueilleux et criminel était fait sur mesure pour lui ! On ne peut pas parler de rôle de composition…
Dimanche 7 septembre : il y a 48 ans mourait Dominique Vallet, dit Alexis
Ce dessinateur virtuose, collaborateur régulier de Gotlib, a illuminé le monde de la BD au cours de sa trop courte carrière, avortée par son décès prématuré.
11h : Malgré la pluie, je suis allé faire ma marche matinale : je suis trop oppressé au réveil pour m’en passer. Évidemment, je rentre trempé : ma mère, qui a eu le temps de se réveiller, accourt à ma rencontre, telle l’adorable Sido dépeinte par sa fille Colette… Sous la douche, j’ai une pensée pour « Au revoir » que l’on entend dans Astérix et les Indiens : le film était certes raté, mais l’enfant que j’étais a été marqué par cette chanson traitant de la séparation définitive de deux êtres qui s’aiment et qui prend, par la force des choses, une curieuse résonance dans mon cœur, aujourd’hui… J’ai souvent dit que ma mère était une éternelle jeune fille, mais tout de même, je ne la voyais pas devenir l’héroïne d’un film d’amour qui finit mal. Suis-je le fils de Sido ou l’enfant caché des amants de Titanic ? Après tout, Maman n’a pas beaucoup à envier à Kate Winslet… Le bon point, c’est que dans le film, Rose survit longtemps à son grand amour.
Le 7 septembre, c'est aussi le jour de la fête nationale du Brésil... Cette photo a été prise en 2004 à Brest, lors des fêtes maritimes internationale : je ne garantis pas que, plus de vingt ans après, cette jeune et jolie artiste brésilienne soit toujours en mesure de rentrer dans ce très seyant costume de scène...
Lundi 8 septembre
13h30 : Avant de laisser ma mère à son triste sort de veuve éplorée, je dispute avec elle une partie de Scrabble ; la télévision est allumée sur France 3 qui diffuse Météo à la carte, ce qui me permet d’apprendre qu’on peut à nouveau se baigner dans la Seine ! Comme quoi la nature n’est pas longue à se régénérer dès qu’on cesse de la malmener : encore faut-il décider d’arrêter de déconner… Ce qui est dommage, c’est que Jacques Chirac ne soit plus là pour en profiter, lui qui avait promis de se baigner dans le fleuve ! Remarquez, pour mettre en œuvre toutes les promesses qu’il n’avait pas tenues au cours de sa carrière, il faudrait qu’il ressuscite au moins quinze fois.
Une petite vidéo où je prouve, une nouvelle fois, à quel point il est facile de travestir la réalité :
17h20 : J’ai enfin réintégré mes pénates où j’avais beaucoup à ranger : outre les affaires que j’avais emmenées pour trois semaines, j’ai ramené un gros tas de provisions cédées par ma mère, ce qui devait me permettre de vivre sur mes réserves pendant quelques temps et de faire des économies… D’autant que je risque de ne pas avoir un appétit gargantuesque ! Je relève mon courrier : je découvre, entre autres, le dernier numéro de L’Éponge avec deux dessins de mon cru dont un où une vieille dame exhorte une petite fille jouant à la marelle de ne pas trop se presser pour grandir… Je trouve ce dessin lamentable, graphiquement parlant : j’aurais pu me passer des lignes directionnelles sous la jupe de la gamine, on aurait quand même compris qu’elle sautait, et, surtout, la vieille est complètement tordue et bancale… Je pourrais vous dire qu’au moment de le réaliser, je venais (déjà !) de perdre un être cher et que ma détresse morale était donc palpable, mais la vérité, c’était que les beaux jours approchaient et que je voulais m’assurer de boucler un maximum des choses, alors je me suis débarrassé de la corvée… Ce n’est pas comme ça que je vais retrouver le goût de la vie !
Le dessin en question, tel qu'il est paru dans la revue :
Mardi 9 septembre
7h30 : J’apprends au réveil la chute du gouvernent : ça aurait bien fait rire Papa ! Mais il n’y a rien d’étonnant : le miracle, c’est plutôt que Bayrou ait tenu neuf mois ! Neuf mois, le temps d’une grossesse… Qui se conclut sur un rejeton mort-né. Qui ne pouvait pas se terminer autrement. L’enfant n’avait aucune chance d’être viable et les parents ont quand même décidé de garder un fœtus mal formé, et ce n’était pourtant pas faute, de la part des médecins, d’avoir recommandé l’avortement avec insistance ! Plus sérieusement, dans la configuration politique actuelle, il aurait fallu une personnalité indiscutable, une sorte d’Antoine Pinay, pas un ancien jeune giscardien dont tout le monde se gausse… Vous me dites que Pinay est mort depuis trente ans et qu’aucune personnalité politique vivante[1] n’a la même aura ? Ah mais je ne cherche pas de solution, moi ! C’est Macron qui a dissous l’assemblée, c’est lui qui a décidé de se foutre de l’avis du peuple, qu’il se démerde ! De toute façon, tant que je n’aurai pas fait retrouver le sourire à ma mère, rien ne me semblera utile, pas même… Non, pardon : rien ne me semblera utile, et SURTOUT PAS un nouveau gouvernement !
15h : Mine de rien, je n’ai pas chômé aujourd’hui : je suis allé à Saint-Renan faire réparer une montre, j’ai récupéré au bureau de poste de Bellevue mes œuvres exposées à La Baule, j’ai pris contact avec un bouquiniste pour lui proposer de racheter la collection de bandes dessinées de ma tante, j’ai récupéré au bureau de poste de Lambé mes œuvres exposées en Auvergne, j’ai réservé mes billets de train pour Lannion où on m’attend en novembre prochain… Papa aurait été fier de moi. Enfin, j’essaie de le croire…
Mercredi 10 septembre : il y a 90 ans s'ouvrait à Brest le procès de Lydia Oswald
Cette sublime Suisse allemande avait su faire tourner la tête de deux officiers de marine : suffisamment pour s'enhardir à leur arracher des renseignements au profit du Reich... Elle n'écopa que de neuf mois de prison après en avoir déjà purgé sept en préventive : comme quoi, même devant la justice, ça sert, d'être jolie...
9h30 : Le nouveau premier ministre a la tête de ce qu’il est : un exécuteur de basses œuvres, programmé pour appliquer robotiquement les consignes de son seigneur et maître et mettant un point d’honneur à oublier que les individus qui se présentent devant lui sont des êtres humains… J’ai l’expérience des monstres de ce type : on les compte par centaines dans les administrations. La nomination de Bayrou m’avait fait pouffer ; celle de Lecornu me fait soupirer.
20h : J’ai passé la journée à dessiner : par sécurité, je n’ai pas quitté mon immeuble. Je ne sais pas ce qu’a donné le fameux mot d’ordre de blocage et je ne veux pas le savoir ! J’ai accueilli un ami en fin d’après-midi et il ne m’en a pas soufflé mot (il est vrai qu’il sait que j’ai d’autres soucis en ce moment) : les types qui se croient importants en lançant des appels à l’insurrection sur les réseaux sociaux pourraient en tirer une leçon de modestie… S’ils en étaient capables.
Jeudi 11 septembre
11h : Un message me confirme l’irrecevabilité de ma demande de bourse auprès du Centre National du Livre. La raison ? Mon livre Voyage en Normalaisie est qualifié de « témoignage » par ces messieurs-dames et ne rentre donc pas dans la catégorie « Histoire et sciences humaines » à laquelle j’avais cru pouvoir le rattacher. Il faut dire que j’avais écrit Voyage en Normalaisie sans me demander un seul instant dans quelle case on allait pouvoir le rentrer, et quand il m’a fallu, sur le site du CNL, choisir un genre dans lequel le faire rentrer, j’ai pris ce qui me semblait le plus proche… Conclusion : je me suis fait envoyer paître parce que je ne rentrais pas dans le moule. Ce n’est pas la première fois…
Pour ajouter un clou au cercueil de la Macronie :
12h55 : Par la force des choses, je ne suis pas un champion de la communication non-verbale : je veux dire qu’il m’est difficile de supputer l’état d’esprit d’une personne rien que grâce à son regard ou au ton de sa voix ; mais là, je vous jure que même si j’avais été sourd et aveugle, j’aurais senti un concentré de haine dans les yeux et les paroles de cet individu ! De qui parlé-je ? Je vous le donne en mille : du conducteur du transport que j’avais réservé pour me rendre à mon rendez-vous médical… Et auquel j’ai simplement demandé de bien vouloir couper sa radio le temps du trajet ! J’ai été bien obligé de lui expliquer que je suis hypersensible au bruit et que c’est précisément l’une des raisons, entre autres, pour lesquelles je fais appel à ce service de transport à la demande… Si j’avais été en fauteuil roulant, il m’aurait probablement fallu lui expliquer pourquoi j’avais besoin qu’il pousse ma chaise !
Un dessin inspiré par la nouvelle de la semaine pour Brest : la nouvelle ligne de tramway et le bus à haut niveau de service seront inaugurés le 14 février prochain.
15h45 : Après mon rendez-vous médical et une visite chez une amie qui m’apporte un réconfort relatif mais réel, je passe à la pharmacie : comme j’ai aussi un truc dans l’œil qui me gène depuis quelques jours (vous ne trouvez pas que j’ai beaucoup de chance en ce moment ?), ce bon docteur m’a prescrit du collyre : la jeune femme qui me sert m’annonce que ce produit n’est pas remboursé par la sécu… Et que, de toute façon, elle n’en a plus et qu’elle doit en commander pour demain. C’est curieux : je devais relativiser les choses avec ce qui vient de m’arriver, et pourtant, ça ne fait que me rendre les petites merdes du quotidien encore plus insupportables… N’empêche : à partir du moment où un produit est prescrit à un médecin, il devrait être remboursé, point barre ! Et ne venez pas me chanter le couplet de la dette publique, vous ne me ferez pas croire que la facture serait plus élevée que celle des jeux olympiques…
Vendredi 12 septembre : il y a cinq ans mourait le dessinateur Bruno Madaule
7h15 : Passage à un laboratoire de biologie médicale du Pilier Rouge pour faire une prise de sang à des fins d’analyse : à la vue de ma Carte Mobilité Inclusion, on m’accorde la priorité sans discuter. La dame qui s’occupe de moi est une femme plutôt souriante avec un fort accent que j’identifie comme vaguement ibérique : je n’ose pas l’interroger sur ses origines, mais elle n’a pas la même pudeur à propos de mon regard, un peu trop fixe à son goût. Je lui réponds que je suis autiste… J’aurais pu préciser aussi qu’il n’est pas tout à fait anormal que je me sente mal à l’aise dans cet endroit où je n’avais encore jamais mis les pieds ! Malgré tout, la prise de sang se passe sans problème…
7h30 : Rendez-vous dans quelques jours pour savoir si mon sang est bien propre ou aussi pourri que celui de Keith Richards avant ses passages en clinique privée[2]. En attentant, je descends la rue de Siam à la recherche d’un établissement ouvert pour engloutir le petit déjeuner que je n’avais pas le droit de prendre avant le prélèvement… Évidemment, je ne trouve rien d’ouvert avant huit heures. Mais je ne me plains pas : j’ai l’occasion d’assister au lever du soleil, et de tous les spectacles qu’offre la nature, c’est celui que j’aime le plus après celui d’un insecte butinant une fleur ; les deux ont en commun de rappeler que la vie continue… Contre vents et marrées.
Terminons avec un petit dessin aux crayons de couleur qui sied bien à cette conclusion poétique :
[1] Je dis bien « vivante », je ne dis même pas « en activité » ! C’est dire si je ne passe la barre très haut…
[2] Précisions que je ne crois pas du tout à la rumeur selon laquelle il se ferait régulièrement changer le sang en Suisse et que je le pense sincère quand il dément cette histoire abracadabrante : je ne fais qu’un trait d’humour, vu ?