Du 21 au 28 mars : Je souhaite un bon anniversaire à Fluide Glacial ! Et désolé pour Emile...

 

Un petit dessin de circonstance pour cet anniversaire :

 

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Vendredi 21 mars

 

17h : À peine descendu du train, me voici à la PAM où j’attends une ancienne camarade de lycée avec laquelle j’ai repris le contact. Elle a commis l’erreur de venir en voiture, elle arrive donc avec un léger retard : elle est aujourd’hui maman d’une petite fille de cinq ans, mais elle n’a pas beaucoup changé. Mine de rien, la PAM est un lieu privilégié pour les retrouvailles : j’y croise aussi mon ancienne prof d’anglais et une poétesse rencontrée aux scènes ouvertes. Rien d’étonnant : située en plein centre-ville, l’ancienne imprimerie devenue tiers-lieu est un endroit rêvé pour se retrouver, bien plus que les Capucins où le gigantisme des lieux peut être écrasant. Ce serait parfait si l’ambiance n’était pas aussi bruyante…   

 

17h15 : Si j’ai pu reprendre le contact avec cette (encore) jeune personne, c’est parce qu’elle a rejoint depuis peu l’équipe des correspondants de Côté Brest. Elle m’explique qu’elle s’est installée à son compte comme rédactrice sur le web mais trouve de moins en moins de clients à cause de l’intelligence artificielle. Je n’en suis pas étonné : après l’obtention de mon doctorat, j’avais tenté moi aussi de me lancer dans cette activité ; à l’époque, il y avait beaucoup de demande sur le web, mais j’ai vite vu que l’immense majorité des clients potentiels n’en avaient rien à cirer de l’élégance stylistique et que leur unique préoccupation était que les textes pour lesquels ils daignaient lâcher leur tune soient « optimisés » à destination des moteurs de recherche ; traduisez : ils voulaient des textes bourrés de répétitions et de formules toutes faites afin que Google les repère plus facilement. Bref, il fallait s’adresser à un algorithme plutôt qu’à des humains : et qui mieux qu’une machine pour s’adresser à une autre machine ? Pourquoi s’embêter à payer un être vivant encombré d’une sensibilité alors qu’un logiciel peut faire exactement ce qu’on attend pour pas un rond et sans faire chier le monde avec ces vestiges du passé que sont la créativité et la personnalité ? Ceci pour dire qu’Internet n’est plus un levier pour la réussite des artistes – si tant est qu’il l’ait été un jour, du reste.

 

18h15 : Je suis arrivé en avance à la piscine car j’ai un problème à résoudre avant le début du cours : je traîne toujours une valise bourrée de dessins encadrés qui n’entrera jamais dans les casiers du vestiaire. Seule solution : retrouver ma monitrice et lui en parler. Coup de chance, je ne tarde pas à la voir : je lui fais un signe et lui explique la situation, elle accepte d’entreposer ma valise dans le local des maîtres-nageurs le temps du cours. Ah, la brave dame ! Heureusement que ça existe encore, des gens comme elle…

Un interlude coquin :

 

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20h : Après trois quarts d’heure de natation, surtout dans la foulée de trois heures de route en train, il n’est pas étonnant que je sois un peu fatigué. Alors, quand des gamins me cassent les oreilles dans ces vestiaires où ça résonne terriblement, je renonce assez vite à la diplomatie et je crie « Oh, les gamins, parlez moins fort, vous n’êtes pas seuls ici ! » Ils la mettent en veilleuse aussitôt. D’habitude, je n’ai aucune autorité sur les ados, alors à quoi dois-je ce miracle ? C’est simple : les gosses ne me voient pas ! Ils n’entendent que ma voix d’adulte courroucé et la crainte que ça leur inspire n’est pas parasitée par l’hilarité qu’éveille spontanément mon physique grotesque… Aussitôt après, j’entreprends de récupérer ma valise dans le local où ma monitrice l’a déposée, mais je suis refoulé par une de ses collègues qui me dit « Les toilettes, c’est à côté » ! À bout de patience, j’oublie toute amabilité pour lui répondre que je ne cherche pas les chiottes et que je veux récupérer un bagage volumineux déposé dans cette pièce. Elle n’était pas censée savoir ce que je venais faire ? Alors pourquoi a-t-elle fait comme si elle le savait déjà, alors ? Si elle m’avait demandé pourquoi je voulais entrer dans ce local, je ne me serais pas senti agressé !

 

20h30 : Machinalement, j’ai pris le tramway pour rentrer et suis descendu à la station où, d’habitude, je prends le bus pour rentrer à Lambézellec. Hélas, j’avais complètement oublié que, travaux obligent, mon arrêt a encore été déplacé ! Et il ne fallait pas s’attendre à ce que Bibus se donne du mal pour un arrêt provisoire : aussi, j’ai toutes les peines du monde à trouver une station où il est affiché clairement qu’elle est desservie par ma ligne habituelle… Errer de nuit, chargé comme un mulet, dans des rues transformées en no man’s land, sans même avoir la certitude de trouver un arrêt où je n’aurai pas à attendre une heure supplémentaire… Il y a pire comme sort, dirai-je pour me donner du courage ! Notre maire nous assure que le nouveau réseau va nous changer la vie : je ne demande qu’à le croire, mais on l’aura payé cher, et pas seulement financièrement ! Il n’empêche que pour l’heure, je peux dire que j’aurai moins galéré pour parcourir les 592 kilomètres qui séparent Paris et Brest que pour faire les trois kilomètres entre le centre-ville et mon quartier

 

21h : J’ai enfin pu attraper un bus pour Lambé, ouf ! Je prends une place assise réservée aux handicapés, j’y ai droit. Cela me vaut la compagnie d’un semi-clodo à la barbe crasseuse qui prend place juste en face de moi ; il renonce assez vite à essayer de sympathiser avec moi mais, à défaut d’une conversation avec cet individu, je n’échappe pas à la gêne auditive que procure un bébé hurleur et qui s’avère d’autant plus agaçante que l’homme accompagnant le bambin lui répète jusqu’à plus soif des « pardon » inefficaces pour calmer l’enfant mais qui cassent un peu plus les oreilles des autres voyageurs… Je repense au doux minois et la voix mutine de l’amie avec laquelle j’ai dîné hier soir : elle me manque déjà…

 

Samedi 22 mars : Le Chat de Geluck a 42 ans

 

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10h30 : N’ayant pu profiter du marché de Lambézellec hier, j’ai fait quelques courses à celui de Kerinou. Bien qu’encore mal remis de ma mésaventure d’hier soir, je décide, pour que ça ne se reproduise plus, de profiter d’être dans le coin pour mener ma petite enquête ; comprenez : puisque ma ligne de bus passe par là, je monte dans le premier véhicule venu pour savoir où je devrai attendre pour rentrer dans les jours à venir. Le résultat ? Comme je m’y attendais, j’aurais pu attendre à l’arrêt de la rue de Kerabecam… Sauf que ce n’était pas précisé ! Il y avait bien un poteau signalant qu’il y avait un arrêt de bus, mais ils avaient « oublié » d’y mettre les horaires de la ligne desservant mon quartier… C’est là qu’on sent à quel point nous, les ploucs de Lambé, nous comptons aux yeux des responsables de chez Bibus ! Je me précipite à l’agence pour leur signaler cet oubli…

- N’empêche que tu aurais eu l’info si tu avais un smartpho…

- LA FEEEERME !!!!

 

21h : Le cauchemar de PPD n’ayant plus aucun secret pour moi, j’essaie l’autre jeu des Guignols de l’info, qui lui est antérieur d’un an et qui avait été intitulé sobrement Le jeu. Le principe est sensiblement différent, mais l’esprit est assez proche : certes le joueur n’y est pas patron de chaîne, mais il doit néanmoins surclasser des adversaires en faisant plus d’audience qu’eux ; re-certes, non pas en programmant des émissions racoleuses mais en ramenant des scoops ; cependant, ça revient finalement au même, non ? Rien d’étonnant : repassez-vous les sketches de la période fondatrice des Guignols, que d’aucuns ont qualifié « d’âge d’or » des marionnettes, l’époque Delépine-Halin-Gaccio, et vous serez surpris par l’importante proportion de running gags tournant autour de rivalités, de lutte des uns pour écraser les autres ! Souvenez-vous : Chirac contre Giscard puis Balladur, Tapie contre Fabius puis Rocard, De Caunes contre Gildas…  Même les personnages apparemment candides avaient du mal à cacher l’Inzogoud qui sommeillait en eux : Foucault n’est pas resté longtemps solidaire de son copain Sabatier quand ce dernier s’est fait virer, et JPP ne pouvait s’empêcher de jalouser Cantona quand celui-ci publiait un livre ou faisait de la pub ! J’avance une hypothèse : et si le succès des Guignols, qui s’était bâti en ce temps-là, n’était justement pas dû en partie au fait que les auteurs de l’époque, avaient compris, ce qui aurait été le moindre de leurs traits de génie, que la guerre des individus avait remplacé la lutte des classes dans nos sociétés ? Voici l’hymne de l’Occident : « On est tous comme Iznogoud, on aime bien jouer des coudes, mais pousse-toi, c’est moi qui passe, lève-toi que je prenne ta place ! »[1] Quoi qu’il en soit, ce jeu, que je découvre, s’annonce plus difficile à apprivoiser que Le cauchemar de PPD : j’ai en tout cas le sentiment que les réputations des personnalités, symbolisées par le « Gigamat » sont très fluctuantes et aléatoires, au point que le joueur ne peut jamais être certain que les reportages qui leur sont consacrés vont vraiment le faire progresser ! Je comprends mieux pourquoi j’ai trouvé sur un forum un message souhaitant « bon courage » pour terminer ce jeu…     

 

Sans transition, un dessin de mon imprimante :

 

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Dimanche 23 mars

 

10h : J’ai un rendez-vous aux Capucins en vue d’un article. J’ai décidé d’en profiter pour me mitonner un programme sympathique : je commence par une séance de natation à la piscine Recouvrance, après quoi je m’offre un bon déjeuner à La Fabrik en attendant l’heure de rejoindre mon informateur. Pour bien commencer, il me faut d’abord arriver à l’heure à la piscine, c’est-à-dire avant la fermeture de la caisse : je pensais naïvement que ce serait un jeu d’enfant, vu qu’à « Brest même », contrairement aux communes périphériques comme celle où j’ai grandi, on peut compter sur trois bus par heure le dimanche. Erreur de calcul : ce n’est vrai qu’après dix heures ! Je dois donc poireauter vingt minutes dans le froid, heureusement que j’ai un livre de Jean Teulé pour patienter…

 

10h30 : Arrivé place de Strasbourg, je constate qu’il me faut attendre encore un quart d’heure pour avoir un tramway. J’arriverai avant la fermeture de la caisse, il n’y rien à craindre de ce côté-là, mais ma patience est déjà sérieusement entamée. Aussi, quand un type à tronche de poivrot, qui hurle des insanités à tout le monde, a l’idée idiote de venir me saluer, je ne peux m’empêcher de l’envoyer paître ! C’est plus fort que moi, je ne supporte pas l’idée d’être assimilé à ce genre de cas social ! Mais évidemment, contrairement aux jeunes glands de la piscine, il a sous les yeux ma bonne bouille qui n’inspire pas le respect, ce qui me vaut un retour de bâton verbal peu douloureux mais gênant…

 

10h45 : Enfin assis dans le tramway, j’ai le déplaisir de voir débarquer une troupe de pisseuses en uniforme : des scouts femelles, quoi ! Enfant, j’ai beaucoup lu Cédric de Laudec et Cauvin ; adolescent, j’ai ri comme une baleine avec Hamster jovial et ses louveteaux du regretté Gotlib ; adulte, j’ai redécouvert avec plaisir le pauvre Ouin-Ouin (dit Pine d’huître) interprété par Antoine de Caunes ; en revanche, je n’ai presque jamais lu La patrouille des Castors : de ce fait, et que Keith Richards me pardonne[2], j’ai un certain mépris pour le scoutisme qui n’a vocation, à mes yeux, qu’à embrigader les jeunes, au même titre que le catéchisme, les clubs de foot et le service militaire – volontaire ou non. Pour ne rien arranger, je n’ai pas eu le temps de décolérer ; aussi, quand une de ces gamines s’approche de moi avec l’intention manifeste de s’asseoir à mes côtés, je demande (sans doute un peu trop brusquement, j’en conviens) : « scouts laïques ou scouts catholiques » ? La môme reste interdite et la cheftaine lui fait signe de s’éloigner : je ne saurai jamais si les « louves » (apparemment, c’était leur nom) patrouillaient pour les curés ou pour le diable, mais je m’en fous ! Le scoutisme, c’est débile ! Je reconnais que les gosses ne s’y sont pour rien si leurs parents sont assez cons pour les y inscrire, et si je regrette d’avoir probablement effrayé une enfant, je suis en revanche bien content d’avoir emmerdé une cheftaine !     

 

11h : J’arrive devant la piscine et je m’étrangle de rage en découvrant sur la porte une pancarte annonçant qu’elle serait fermée au public le dimanche pour cause de compétition ! Une fois le premier réflexe de colère passé, je me rends subitement compte que la date de fermeture annoncée est le 30 mars : donc, aujourd’hui, je peux entrer ! Soulagé, je ne m’en prive pas et je m’offre une bonne séance de natation, non sans maudire quand même l’esprit de compétition qui pourrit décidément l’existence des gens qui, comme moi, veulent simplement vivre sans forcément écraser autrui…

 

12h30 : L’apaisement que me procure la natation est toujours très fragile : aussi, quand j’arrive à La Fabrik, j’ai bien du mal à dissimuler mon impatience et à rester aimable devant le choix qui m’est proposé. Le restaurant proprement dit est complet, pas moyen de s’y installer sans avoir réservé ; je me rabats donc sur la partie « Street food » qui, le dimanche, ne propose que des brunchs : j’avoue éprouver quelques difficultés à comprendre le fonctionnement ! Apparemment, on paie d’avance et on se sert soi-même. Mais c’est quand la caissière m’annonce le prix que je sors vraiment de mes gonds : 28,90 euros ! Débourser 30 euros pour être traité comme au self du Restaurant Universitaire, merci bien ! Je pars sans demander mon reste : à la sortie, je suis fou de rage, mon estomac crie famine et je ne peux m’empêcher de hurler « Vos gueules » aux gosses qui font leur boucan habituel… 

En interlude, une composition abstraite que j'ai intitulée De profundis Clownavi :

 

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13h : Ayant encore du temps avant mon rendez-vous, j’ai pris le téléphérique pour sortir des Capucins et me mettre en quête de nourriture, mais presque tout est fermé. Mais il y a un dieu pour les autistes : il m’envoie une amie en pleine goguette avec son fiancé et cet ange gardien me conseille d’aller au marché Saint-Louis « où il doit encore y avoir de quoi ». De fait, après une recherche pas trop laborieuse (j’ai quand même failli engueuler un gamin qui était à deux doigts de me rentrer dedans), j’ai trouvé un stand de crêpière au rapport qualité-prix honnête. Ce n’est pas gégène mais ça me fait quelque chose dans le ventre avant mon rendez-vous…

 

13h30 : Retour aux Capucins : ayant encore un peu de battement, je décide de boire un thé à la boutique de la Brûlerie du Léon. Évidemment, il ne faut pas espérer y voir Clément Bozec un dimanche, je suis donc accueilli par une jeune femme qui doit être d’origine étrangère ou avoir un handicap que je n’identifie pas : j’ai donc un mal de chien à saisir ce qu’elle me dit et j’ai besoin de l’intervention de sa collègue pour comprendre qu’elle essaie de m’indiquer l’endroit où il faut passer commande… Je finis par avoir, pour un prix raisonnable, une théière bien pleine, mais cet incident m’inspire deux réflexions : premièrement, il est tout de même ahurissant qu’il faille commander à un endroit précis dans une échoppe où le comptoir fait au moins trois mètres de long ! Aujourd’hui, les entreprises et les administrations se donnent le mot pour normaliser nos conduites et les forcer à se conformer à un plan prédéfini : dans certains cas, cela peut faciliter le travail des employés, mais je doute que ce soit le but premier des décideurs ! Deuxièmement, malgré tous mes beaux discours en faveur de l’inclusion, je suis obligé d’admettre que toutes les différences ne sont pas facilement compatibles entre elles au quotidien : dans le cas présent, je suis tombé sur une employée qui a besoin, pour être comprise, d’un effort qu’il m’est difficile de fournir du fait de mon autisme… Attention, je maintiens que l’inclusion est nécessaire : je n’ai jamais dit qu’elle était facile ! Au contraire, il est très facile d’exclure, c’est même justement ce qui permet à certains individus peu recommandables de triompher : si les populistes ont de l’audience, c’est justement parce qu’ils promettent au mâle blanc cisgenre valide et catholique de ne plus devoir se faire chier à tenir compte de ce qui ne lui ressemble pas ! C’est d’ailleurs une raison supplémentaire pour rester vigilent, ne pas se laisser aux solutions de facilité, parmi lesquelles je rangerai l’inclusion irréfléchie, pratiquée sans tenir compte des difficultés réelles des personnes concernées, qui ne rend que plus tentante pour les nantis et les imbéciles l’autre facilité qu’est l’exclusion pure et simple…  

 

14h : Enfin l’heure de mon entretien : le rendez-vous avait été donné devant l’entrée de la médiathèque. J’avais complètement oublié que j’avais déjà rencontré ce monsieur : un homme qui n’a pas l’usage de ses jambes, j’aurais dû m’en souvenir, pourtant. Je lui dis avoir besoin d’un endroit relativement calme, ce qui n’est pas facile à trouver aux Capucins : nous nous rabattons sur un espace peu fréquenté à l’étage – bien sûr, nous prenons l’ascenseur pour monter. Tout en cheminant, je ne peux m’empêcher de lui dire « Chacun sa croix : vous, vous n’avez pas l’usage de vos jambes, moi, j’aimerais ne pas avoir l’usage de mes oreilles ! » Croyez-vous que cette formule le fasse protester ? Pas du tout, il m’approuve ! Là où les neurotypiques m’accuseraient de vouloir me faire plaindre et dorloter, cet individu en fauteuil roulant ne cherche pas pour autant à me convaincre que mon handicap est forcément moins lourd que le sien sous prétexte qu’il est invisible ! Je conclus en rappelant notre point commun, le plus essentiel de tous, celui que les gens « normaux » ont souvent tendance à oublier : « nous ne l’avons pas choisi ». Il ne trouve rien à redire ! Notre entrevue proprement dite ? Rendez-vous prochainement dans Côté Brest pour savoir de quoi nous avons parlé…

 

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Lundi 24 mars

 

16h : À l’issue d’une séance chez ma psychologue, je récupère mes œuvres exposées à l’hôtel de ville. Revenir en ces lieux après ce qui s’est passé la semaine dernière n’était pas fait pour arranger mon humeur, je m’attendais donc à essuyer des remontrances de la part des bénévoles… Mais non, rien ! Elles ne m’en pipent mot, elles semblent ne même pas être au courant ! C’est encore pire… Je pars sans demander mon reste, bien décidé à sauter dans le premier bus pour réintégrer mes pénates.

 

16h30 : Le premier bus tarde à arriver. Depuis que le boulevard Léon Blum est en chantier à son tour, la circulation à l’heure de pointe prend des allures de cauchemar au quotidien, mais je ne pensais pas que l’heure de pointe commençait aussi tôt. Lassé d’attendre, je me rabats sur le tramway afin de pouvoir prendre le bus qui part de la place de Strasbourg…

 

16h50 : Au niveau de la place de Strasbourg aussi, il y a du retard, ce que me confirme un coup de fil passé à Bibus. Je suis à deux doigts d’exploser !

 

17h : Je suis enfin dans le bus, mais celui-ci est bourré à ras bord d’ados qui rentrent du bahut. Pas question pour moi de rester debout, surtout s’il y a des bouchons ! Je sors donc ma Carte Mobilité Inclusion, je la montre au jeune qui occupe la première place assise que je trouve… Et vous savez quoi ? Essuyer un refus malgré la présentation de cette carte tout à fait officielle : check ! J’arriverai finalement à m’asseoir, non sans éprouver des sentiments violents contre ce jeune crétin… Je ne dis pas que ma conduite est toujours exemplaire, loin s’en faut ! Je ne cède pas spontanément ma place à un vieux croulant, c’est vrai ! Mais si je la refusais à quelqu’un qui me le demanderait expressément en me montrant une carte semblable à la mienne, j’aurais du mal à me regarder dans une glace en rentrant… Je ne voudrais pas insister lourdement sur l’amoralisme de notre société, mais je pense qu’on n’a jamais que la jeunesse qu’on mérite…

 

Mardi 25 mars : Fête nationale grecque

Une photo de moi à Athènes en 2007 :

 

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14h15 : Sur les conseils de ma psy, je suis allé voir mon médecin traitant pour vérifier si la mélatonine n’était pas contre-indiquée pour moi ; ayant reçu l’aval de mon généraliste, je me suis rendu à la pharmacie du centre commercial situé à deux pas de son cabinet… Mais ils n’avaient pas de mélatonine ! Parlez-moi de la grande distribution, tiens !

 

15h : Je me rabats sur la pharmacie de mon quartier : ils ont de la mélatonine à me vendre, mais celle-ci coûte plus de trente-cinq euros. Comme ce n’est pas remboursé par la sécurité sociale, la vendeuse me propose le générique qui coûte vingt euros de moins mais qu’elle devra commander et que je ne pourrai acquérir que demain : j’accepte évidemment, trop content de réaliser une économie substantielle et, surtout, de ne pas tomber dans le piège d’un système absurde et injuste ! Parce que, si j’ai bien compris, les médicaments génériques ont la même efficacité, ou peu s’en faut, que ceux que l’on vend sous une marque, et les premiers coûtent plus du double dans le commerce : comment justifier ça ? Vous n’allez pas me faire croire que si on achète la marque, les chercheurs qui ont trouvé la molécule gagneront mieux leur vie ! Non, ce doit être le même système que pour la bouffe dont le prix est multiplié quatre ou cinq fois : ce sont les intermédiaires qui s’en mettent plein les poches et le producteur n’est pas mieux payé ! Alors pourquoi tomber dans ce piège à cons ? D’autant que la mélatonine est censée améliorer mon sommeil : si je contribue à engraisser un peu plus des parasites rapaces, ça ne va pas m’aider à bien dormi, au contraire !

 

Une composition abstraite dessinée au cours du soir :

 

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Mercredi 26 mars

 

17h : Je m’attendais à recevoir prochainement le Fluide Glacial spécial 50 ans, mais je ne m’attendais pas à ce que ce soit aussi tôt ! C’est donc « déçu en bien », comme disent nos amis Helvètes, que je feuillette ce beau gros numéro de 164 pages dont une bonne partie rend hommage à la longévité du magazine avec ce que les Anglo-saxons appellent des crossovers : par exemple, les Bidochon rencontrent Pascal Brutal et les Spartiates de Prieur et Malgras croisent Litteul Kévin ; un bel exemple d’auto-dérision de la part de la vénérable revue !

 

Une pensée pour Jacques Diament, premier rédacteur en chef de Fluide, qui nous a quitté le mois dernier - c'est moins ressemblant que chez Boucq, mais ça l'est plus que chez Gotlib, tout de même :

 

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20h30 : Dîner au Biorek après le cours du soir, voilà qui est fréquent venant de moi. Y rencontrer une connaissance qui se trouve être une lectrice fidèle du présent blog, c’est déjà un peu plus inhabituel. Mais que celle-ci m’annonce s’improviser la manageuse d’un jeune prodige de la scène musicale brestoise, voilà qui est franchement surprenant ! Elle me montre le clip de de son poulain et je me rappelle effectivement avoir lu un article sur lui dans Côté Brest ; mais je n’avais pas eu la curiosité d’essayer d’en savoir davantage. Je dois bien être le seul : il parait qu’à la scène ouverte où elle l’a accompagné récemment, il a été accueilli comme une rock star ! J’ai toujours un train de retard sur les tendances… Vu que je m’en fous éperdument ! Malgré ça, je souhaite bien évidemment à ce jeune artiste de réussir… Et je ne dis pas ça parce que je sais que son agente me lit !

 

Jeudi 27 mars

 

11h : L’attention des médias semble monopolisée par la mort du petit Émile. Bon, je suis bien d’accord pour dire que c’est horrible pour la famille de ce pauvre gosse… Mais je doute fort que cette surexposition médiatique soir de nature à aider les proches de la victime à faire leur deuil ! Si je perdais un enfant dans des circonstances aussi tragiques, je n’aurais pas forcément envie qu’on utilise son sang pour en faire du boudin d’information[3] ! Je ne pense pas non plus que ça aidera la justice à travailler dans la sérénité qui lui est nécessaire… En fait, ce sont les questions que je me pose à chaque fois qu’un meurtre crapuleux de gosse défraie la chronique ! Mais là encore, j’ai conscience d’appartenir à une minorité : les bons cons broute-paille et mange-merde ont soif de ce genre d’horreur. Comme disait Albert Camus dans La chute, « c’est leur petite transcendance, c’est leur apéritif », ça les conforte dans l’idée que leurs vies ne sont pas aussi minables qu’elles en ont l’air, qu’ils on raison de se laisser entuber par des politicards démagogues et de se faire toujours plus surveiller…

 

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19h30 : À l’issue d’un après-midi consacré à quelques tâches ingrates mais nécessaires, j’apprends que la dette de la France atteint un niveau record : je ne voudrais pas jouer à « monsieur je vous l’avais bien dit », mais il n’empêche que je m’en doutais ! D’une part, les sacrifices auxquels les citoyens ont consenti en laissant brader les services publics n’avaient aucune chance de combler le déficit : le coût du bien-être quotidien n’est rien en comparaison de celui des gaspillages des décideurs ! D’autre part, tous les pays qui ont accueilli les jeux olympiques ou quelque autre grande compétition sportive ont connu par la suite un désastre économique, dû notamment au fait que les retombées financières sont toujours surévaluées ! Mais je pense que Macron ne sera pas disposé à renoncer aux voyages officiels censés donner l’illusion qu’il représente quelque chose sur la scène mondiale, pas plus que ses électeurs ne seront prêts à admettre que les si merveilleux jeux de Paris auront été un gouffre financier ! Bref, il ne faudra pas vous étonner si on annonce de nouvelles coupes budgétaires pour l’hôpital et l’école publique ! Et quand les soignants et les enseignants manifesteront contre ces mesures injustes, vous les traiterez de « salauds de fainéants de fonctionnaires qui prennent les usagers en otages » ! Et vous vous étonnerez d’être mal soigné et d’avoir des enfants incultes… Et vous vous étonnerez que la dette continue à augmenter !

 

Mon dernier slam :

 

Vendredi 28 mars

 

9h : Je me suis levé relativement tôt et le temps est pourri : deux facteurs dont la concomitance assure une faible fréquentation du marché. Je m’attends à une belle sérénité, ce qui, évidemment, me rend insupportable tout ce qui vient contredire cette espérance ! Aussi, devant le stand du charcutier, je prie la première personne qui parle un peu trop fort de baisser d’un ton, non sans montrer ma carte « Je suis autiste ». Mais cet individu, qui dit pourtant travailler avec des handicapés, se croit en droit de me toucher ! Je hurle : pour quelqu’un qui prétend connaître les gens du spectre, il ne fait pas étalage de discernement… Peu après, me présentant devant le maraîcher dans des dispositions mitigées, je commets l’erreur de garder ma monnaie à la main : hélas, un coup de vent soulève ma capuche, et en levant ma main pour la rabattre, je jette en l’air cinq euros en pièces sous les yeux consternés des (heureusement) rares témoins… Je hurle de plus belle : après avoir repris mes esprits, je récupère trois euros. Plaie d’argent n’est pas mortelle : c’est surtout mon amour-propre qui souffre…    

 

15h15 : Le temps s’est fait plus clément, j’écris la fenêtre ouverte, ce qui me vaut d’être hélé par un passant qui me demande s’il y a des appartements à louer dans cet immeuble : je réponds que je n’en sais rien et qu’il doit s’adresser à BMH… Ce n’est pas encore maintenant qu’on va relever le niveau intellectuel moyen des locataires !

 

Avant de conclure, une mini-BD : Renan Apreski interviewe Bécassine

 

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C'est tout pour cette semaine, à la prochaine !



[1] Extrait de la version longue de la chanson composée par Alain Garcia et Michel Dax pour le générique de la série animée Iznogoud.

[2] Keith a été scout et ne manque de faire la promotion de ce mouvement dans son autobiographie : concluez-en ce que vous voulez.

[3] Emprunt assumé au slogan du Groland à l’époque de Canal International : « Avec le sang du monde, on fait du boudin d’information ! »



28/03/2025
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