Du 13 au 19 juin : Iran-Israël : à quoi bon commenter ?
Voici quand même un dessin pour ouvrir le bal puisque c'est le gros sujet de la semaine :
Vendredi 13 juin
17h : Le téléphone sonne ; ce n’est pas sans une certaine appréhension que je décroche, craignant qu’on ne m’annonce que le déplacement que j’avais réservé ne saute à son tour. Finalement, c’est pire que ça : le chauffeur du taxi dans lequel j’avais effectué mon déplacement du 6 juin s’est plaint de ma conduite peu amène (je ne peux prétendre le contraire) et on me fait donc comprendre que si j’oublie à nouveau de dire « bonjour », « au revoir » et « merci » au conducteur, je risquais d’être rayé des listes des bénéficiaires du service… Alors comment dire ? Et d’une : si j’étais dans cet état qui m’avait fait oublier toute amabilité, c’était parce qu’ils s’étaient arrogé le droit de m’annuler un aller sans me le demander sous prétexte que je n’aurais eu « de toute façon » aucune possibilité de rentrer ensuite – il ne leur serait pas venu à l’idée que je pouvais faire appel à un parent ou à un ami ; en d’autres termes, ils me reprochent ce qu’ils ont eux-mêmes provoqué ! Et de deux : à cause de cet imprévu au carré, j’étais en pleine crise autistique, ce qu’ils me reprochent n’est donc jamais qu’une manifestation de mon autisme ; par conséquent, ils menacent de me priver d’un service essentiel au nom de ce qui, précisément, me le rend essentiel ! Curieuse conception de l’inclusion, non ? Et de trois : si mon attitude déplaisait tellement à ce chauffeur, il aurait pu me le dire en face au lieu d’aller se plaindre à sa hiérarchie ! Avec une mentalité pareille, je n’ose imaginer ce qu’il aurait fait à une certaine époque où les handicapés se voyaient offrir un aller simple pour Auschwitz...
Pour revenir à l'actualité internationale :
19h : Dernier cours de natation de l’année ; la monitrice me confirme que je ne pourrai plus rester au niveau débutant à la rentrée et que je passerai donc en « Apprentissage 2 ». Je lui fais part de mon inquiétude : je ne tiens pas à me retrouver avec un vociférateur qui me méprisera et m’appellera « Gros lard » ! « Mais non, me dit-elle, ce sont mes collègues, tu les connais ! » Non, je ne les connais pas : je les ai probablement croisés toutes les semaines cette année mais je n’ai jamais eu à interagir avec eux, donc je ne les connais pas. Pourquoi part-on du principe qu’il suffit de croiser quelqu’un régulièrement pour le connaître ? Enfin bon, si elle répond de ses collègues, ça suffit à ma quiétude…
Et encore :
Samedi 14 juin
13h30 : J’avoue que j’ai hésité : j’y vais, ou non, à la Marche des Fiertés ? Mais après un déjeuner tardif, je m’avise qu’il est déjà trop tard pour que j’arrive à temps… Tant pis, de toute façon, j’ai été tellement par monts et par vaux cette semaine que je n’ai pas envie de ressortir. Et puisque je suis artiste, il faut bien que je crée un peu de temps en temps, non ?
Dimanche 15 juin : fête des pères
Petite précision : ce dessin n'est qu'une blague (assortie d'un hommage à Reiser qui avait fait quelque chose de similaire à propos de la fête des mères) ! Je n'ai pas l'intention de me faire vasectomiser... Pour l'instant.
11h : Petite visite à une amie rentrée récemment de voyage ; chaque fois que je viens chez elle, la télé est allumée, mais elle ne la regarde pas vraiment : beaucoup de neurotypiques laissent ouverte leur « étrange lucarne » pour avoir une « présence » ou un « bruit de fond » ; je ne comprendrai sans doute jamais ce que ça peut leur procurer, mais ce dont je suis sûr, c’est que si les programmateurs télé avaient davantage conscience de ce mode d’utilisation, plus répandu qu’on ne le pense, du petit écran, ils seraient moins prompts à affirmer crânement que des millions de gens regardent telle ou telle émission… Je n’ose pas demander à mon ami de zapper ou d’éteindre le poste quand la sale gueule de Zemmour apparaît : je ne voudrais pas lui laisser croire que je prête moins attention à sa conversation qu’à ce que diffuse sa boîte à images…
Une autre sale gueule :
17h45 : Concert de Sterenn Alix à la crêperie « La petite fugue » ; j’avoue que je ne connaissais pas ce petit établissement situé dans une rue parallèle au bas de Siam, cette découverte est intéressante. En revanche, le talent d’autrice-compositrice-interprète de Sterenn n’est plus une découverte pour moi qui l’avais connue aux scènes ouvertes du Café de la plage : c’est donc avec un immense plaisir que je retrouve cette jeune chanteuse délicieusement vindicative que je n’avais pas revue depuis un certain temps : depuis quelques mois déjà, elle vit à Landerneau qui est décidément une ville attractive, c’est au moins la troisième de mes connaissances qui me dit y vivre ou y travailler… Elle profite de ce concert dans une petite salle bondée pour annoncer la sortie prochaine de son EP : un événement à ne pas rater !
Un croquis réalisé au cours du concert :
Deux dessins inspirés par le contenu des chansons :
Une photo de Sterenn en pleine action :
Et une autre avec un portrait réalisé par votre serviteur :
Lundi 16 juin
8h50 : Voyage en Accemo pour aller travailler aux archives municipales. Le véhicule est un taxi, conduit par le chauffeur qui m’a dénoncé : il n’ose même pas me parler… Je ne m’étais pas trompé sur son courage ! Comme quoi la France n’a pas changé depuis 1940…
A propos de fascisme :
9h30 : Alors que j’épluche de vieux dossiers, je peine à me concentrer à cause de la conversation de la guichetière avec un collègue : n’y tenant plus, je finis par leur faire remarquer que c’est bien la peine d’intimer le silence aux usagers si c’est pour leur casser les oreilles ! Que peut-on répondre à cela ?
Et encore :
13h : Rentré au bercail, je tombe sur une vidéo promotionnelle vantant le retour de la bouteille consignée en Bretagne… Je ne peux m’empêcher de rire : quand, enfant, je lisais de vieilles BD où il était question d’emballages consignés, je ne manquais pas d’exprimer mon incompréhension à mes parents qui m’expliquaient donc en quoi consistait ce système qui tendait déjà à tomber en désuétude quand ils étaient eux-mêmes petits… Donc, si je résume bien, voilà ce qui s’est passé. Un : on abandonne la bouteille consignée parce que les gens en ont marre de se faire chier à retourner au magasin rien que pour récupérer trois malheureux sous en échange d’un contenant dont ils n’ont plus rien à foutre. Deux : les emballages jetables se généralisent et on finit par s’aviser que si c’est pratique pour le consommateur, c’est surtout un gros gaspillage de matière première, alors on bourre le mou aux gens pour qu’ils recyclent leurs bouteilles. Trois : à cause de l’inflation, les gens ne crachent plus sur les trois malheureux sous que la consigne leur permettrait de récupérer et, surtout, on s’avise que recycler un déchet, c’est bien, mais qu’éviter de le produire, c’est encore mieux ! Et c’est ainsi que les citoyens renouent avec une pratique que leurs grands-parents tenaient déjà pour une survivance d’un passé presque révolu… Et le cas n’est pas isolé : quand ma mère était jeune maman, nul n’aurait imaginé sérieusement que l’automobile individuelle serait de plus en plus tricarde en centre-ville, au profit du vélo voire de la trottinette, ou que le disque vinyle prendrait sa revanche sur le CD qui était censé l’enterrer ! D’où l’inutilité absolue de se mettre « à la page » à tout prix : ce qui est le comble du ringard aujourd’hui peut très bien redevenir le top de la modernité sans coup férir…
Et encore :
15h30 : Je prépare les actes de la journée d’étude sur Cavanna que j’avais organisée en février dernier. Vous avez des étoiles d’admiration dans les yeux en lisant cette phrase ? Chassez-les tout de suite : loin d’honorer les belles-lettres, je suis en train de m’abîmer les yeux à adapter aux normes de la revue les notes de bas de page d’un article qui m’a été envoyé par l’un des contributeurs… Ce serait évidemment plus simple s’ils prenaient tous la peine de respecter d’entrée de jeu les consignes qu’on leur fournit clairement ! Mais j’ai cru remarquer que les gens aimaient bien que d’autres gens se fassent chier à leur place…
Le 16 juin, c'était aussi le jour des 51 ans d'Alexandre Astier :
Cette photo a été prise de justesse en 2013 alors qu'il s'apprêtait à quitter la Fnac de Brest à l'issue d'une séance de dédicace qui avait eu un franc succès.
Mardi 17 juin
13h : Je sors en ville où m’attend notamment ma psychologue. Dans le hall de l’immeuble, je croise un type qui vient distribuer des prospectus : je ne peux pas m’empêcher, avant de partir, de le surveiller pour m’assurer qu’il n’en glisse pas un dans ma boîte aux lettres sur laquelle une étiquette indique clairement que je ne veux pas de pub ! Je sais que je ne devrais pas fliquer comme ça des gens qui en sont réduit à de si peu glorieuses extrémités pour gagner leur vie, mais je déteste tellement la pub que je ne peux m’empêcher d’y oublier toute conscience de classe… Que je n’ai jamais vraiment eue, du reste.
Une image estivale parce que j'imagine que vous en avez plein le dos vous aussi des violences et des cataclysmes :
16h : Après mon rendez-vous chez la psy et un passage à la mutuelle, j’ai décidé d’aller à la piscine pour ne pas laisser perdre la dernière entrée que j’ai sur ma carte. Je pensais naïvement que je gagnerais du temps en prenant le bus. Résultat, pour aller de la gare à la place de la Liberté, je mets un quart d’heure ! Vivement le nouveau tramway…
Et encore une :
Mercredi 18 juin
18h : Dernier cours de dessin de l’année : on prend l’apéro à cette occasion. C’est même le dernier cours tout court pour moi car j’ai décidé de ne pas me réinscrire à la rentrée prochaine : bien m’en prend si j’en crois les conversations qu’entretient la prof avec les autres élèves ! Le discours sur la « rentabilité » commence à faire son entrée dans les écoles d’art, et on sait déjà quels dégâts ils ont commis dans les domaines de l’éducation, de l’énergie, des transports… Les riches d’aujourd’hui n’en ont plus rien à foutre de l’art, ils sont persuadés que les IA finiront par remplacer tout ce pour quoi ils daignent encore lâcher quelques sous ! Bien sûr, ils finiront par déchanter : ce ne serait pas la première fois qu’une technologie susciterait plus de fantasmes qu’autre chose ! Mais d’ici là, on a le temps d’en baver… Ou alors de réaliser la prophétie de Reiser : « Tous au chômage… On aura du temps… On refera le Monde[1] ».
Et une autre :
Jeudi 19 juin
18h : Malgré la chaleur qui n’incite pas à l’aventure, j’ai quand même pris la peine d’aller à la MPT du Guelmeur pour faire acte de présence à ce qui sera probablement la dernière étape de l’exposition Flot Raison consacrée aux poèmes de Myriam Guillaume et à leur illustrations respectives : en effet, Myriam n’a plus que quatre exemplaires de son recueil à vendre et a déjà fait abondamment circuler son exposition, elle a donc décidé de tourner la page et de destiner ses prochains poèmes à un autre livre. Vous avez donc jusqu’au 11 septembre prochain pour en profiter, vous êtes prévenus !
Une photo de l'expo - l'illustration du milieu est de moi :
18h15 : Je profite du vernissage pour montrer un échantillon de mo travail à la responsable culturelle de la MPT en vue d’une éventuelle exposition de mes œuvres dans ces murs. Elle me demande si je suis sur Instagram, je réponds par la négative ; elle me demande aussitôt « Mais alors comment vous faites pour montrer votre travail ? » L’idée de ne plus être sur un réseau social semble devenue aberrante, de nos jours…
Une vidéo où j'interprète un nouveau slam consacré à un personnage tellement méchant qu'il en devient sympathique :
Vendredi 20 juin
7h : Tonnerre de Brest : l’orage éclate et une pluie bienvenue vient rafraîchir une atmosphère qui est resté étouffante toute la nuit. La chaleur ne m’a cependant pas empêché de dormir : mon périple urbain de la veille m’a épuisé et, à peine rentré, j’ai été assommé par un message m’annonçant que mon père était à l’hôpital avec une infection urinaire, je me suis donc écroulé sur mon lit… Alors je sais qu’il y a des choses plus graves dans le monde, mais est-ce que j’ai quand même le droit de m’inquiéter pour ma famille ? J’ai l’impression que c’est toujours à la même période de l’année qu’arrivent les choses plus dramatiques ou les plus inquiétantes… Je crois que je déteste l’été.
En guise de post-scriptum, voici deux croquis réalisés la semaine dernière à la PAM lors des dix ans de la plateforme Kengo et que j'avais oublié de vous montrer :
[1] Jean-Marc REISER, La ruée vers rien, Albin Michel, Paris, 1998.