Du 8 au 13 avril : Les décideurs savent tout mais ne connaissent rien !

 

Commençons avec un beau dessin : Greta la Gremlin enceinte ! Je me suis inspiré d'une belle photo de la non moins belle Laëtitia Milot quand elle se trouvait dans cette position que l'on dit intéressante - mais qui ne l'est pas forcément pour certaines femmes... Précisons tout de suite : je sais très bien que dans les deux films, les Gremlins se reproduisent en s'aspergeant d'eau, pas la peine de m'en faire la remarque ! 

 

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Lundi 8 avril

 

10h : Après un week-end de réclusion volontaire, je me rends chez ma psychologue à pied, ce qui me permet de découvrir les affiches de LFI pour les élections européennes. Je ne sais pas s’ils y croient vraiment : personne ne s’intéresse à cette campagne, si tant est que les gens s’intéressent encore aux autres élections… Ils ont pourtant raison de montrer qu’ils sont mobilisés : la gauche, c’est eux, maintenant ! N’en déplaise à tous ces imbéciles qui les trouvent plus dangereux que le RN… Et puis Manon Aubry est vraiment très mignonne : elle fait moins peur que Marion Maréchal, en tout cas !

 

18h : Prélude à la tempête Pierrick : il fait déjà un vent à décapiter les bœufs quand j’attends le bus sur la place de Strasbourg. Ces intempéries commencent à me lasser, mais, surtout, je commence sérieusement à me demander pourquoi, dans une ville comme Brest, on ne peut pas bénéficier d’abribus un peu mieux abrités de la pluie et / ou du vent ! Si c’est un signe de mépris envers les usagers des transports publics, c’est grave. Si c’est par méconnaissance de la réalité climatique de Brest, c’est encore pire !

 

Mardi 9 avril

 

10h : Il ne pleut pas (pour une fois !) et j’ai prévu de passer l’après-midi à travailler sur mes planches de BD. Alors, pour me mettre en train, je m’accorde une sortie sylvestre au petit bois situé en face de chez moi. Je croise pas mal de propriétaires de chien qui promènent leur animal : je suis un peu triste pour eux quand je pense qu’ils risqueront bientôt une amende s’ils ne tiennent pas en laisse leur toutou ! Encore une loi profondément injuste qui pénalise ceux qui n’ont pas de jardin ou n’ont pas beaucoup de terrain : même posséder un chien va devenir un privilège ! Heureusement que nous sommes dans un pays démocratique !  

 

19h30 : Je conclus la journée en redécouvrant Garfield. J’ai presque honte de l’avouer, mais ça me fait autant rire que Mafalda ! Le chat de Jim Davis est tellement cynique et a un tel sens de la répartie qu’il est difficile de ne pas éclater de rire ! Garfield est goinfre, paresseux et égocentrique, il passe son temps à manger, dormir et à embêter son entourage… Et pourtant, on ne peut pas s’empêcher de le trouver sympathique. Pourquoi ? Cette bonne blague : parce que tout le monde rêve de pouvoir se comporter comme lui ! La vie serait belle si c’était le cas, non ? De surcroît, l’agressivité de Garfield envers ses proches n’est pas complètement gratuite : son maître est immature et aussi charismatique qu’une huître, le chien Odie est bête comme ses pattes, même le chaton Nermal n’est finalement qu’un petit branleur qui me rappelle mes anciens tourmenteurs – s’il était humain, il se ferait décolorer les cheveux, il arborerait piercing et tatouage et exhiberait sur Instagram ses abdos travaillés en salle ! En fin de compte, le plus potable des personnages est Liz, la belle vétérinaire qui est devenue la fiancée de Jon après lui avoir longtemps résisté : Garfield ne s’y trompe pas et lui témoigne un respect relatif mais réel, il va même jusqu’à lui déclarer « Si Jon ne veut pas t’épouse, moi, je veux bien » ! De ce point de vue, il est bien comme tous les chats : il ne se trompe pas sur les gens ! Bref : Garfield, continue à être haïssable, c’est comme ça qu’on t’adore ! Et puis qui n’aimerait pas accorder un petit grattage de ventre à un beau gros chat tigré comme lui ?

 

Mercredi 10 avril

 

14h : D’humeur maussade après avoir à nouveau marché sous la pluie, je boucle néanmoins la retranscription de l’entretien que m’a accordé Delfeil de Ton à Paris. J’ai du mal à être d’accord avec lui quand il dissocie Cavanna l’auteur comique de Cavanna le pamphlétaire : je suis sûr que dans l’esprit du grand homme, ça formait un tout et que, même quand il se prenait au sérieux, l’humour n’était jamais loin, ne serait-ce que dans sa manière d’exprimer ses révoltes et des indignations. Comme dit un autre grand humoriste, François Morel, l’humour n’est qu’un ingrédient, pas une fin en soi ! Mais je respecte complètement le point de vue de Delfeil de Ton : de toute façon, Cavanna était si foisonnant qu’il n’y a rien d’incongru à n’apprécier qu’une partie de son œuvre. Pour ma part, j’estime qu’il n’y a rien à jeter, et surtout pas ses romans historiques si mal-aimés de la critique… Découvrez l'interview de Delfeil de Ton par votre serviteur dans le numéro 7 de mon fanzine Blequin Reporter.

 

15h30 : Je profite d’une halte à Bellevue pour renouveler mon abonnement au réseau des médiathèques de Brest Métropole. Cette formalité bénigne tourne à l’aigre car les bibliothécaires ont la mauvaise idée de m’adresser la parole toutes les deux en même temps ! Comment voulez-vous que je les comprenne ? Il n’en faut pas plus pour que je sois dans de mauvaises dispositions, et ça ne rate pas : quand l’une d’elles entreprend de m’expliquer qu’au bout de deux ans sans réinscription, ils « nettoient » leurs fichiers des personnes désinscrites, je ne me prive pas de juger le terme inapproprié pour parler d’êtres humains ! Je n’arrive pas à regretter cette petite colère : l’emploi de certains termes est souvent révélateur du rapport que l’on entretient avec son prochain et du type de société que l’on est prêt à accepter…

 

17h15 : Avant de quitter la médiathèque, je feuillette un album de bandes dessinées due à une dessinatrice que j’apprécie : Stella Lory. Je l’avais découverte dans Fluide Glacial et j’avais apprécié son graphisme efficace et expressif, je le trouve d’ailleurs particulièrement adapté à la BD en question, qui raconte les mésaventures d’un adolescent qui se réveille chaque matin avec un pouvoir différent ! Certains y verront une métaphore des misères de la puberté : pour ma part, je préfère y voir une histoire vachement marrante ! C’est déjà bien, non ?

 

Un petit dessin représentant votre serviteur en compagnie de trois femmes d'âge mûr qui fréquentent le même cours de dessin que moi et que j'appelle affectueusement "mes vieilles canailles" :

 

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Jeudi 11 avril

 

11h : Après avoir fait mon ménage, je consulte ma boîte mail et découvre un message que j’attendais avec appréhension depuis un certain temps : il émane d’un officier de police… Apparemment, mon pré-dépôt de plainte en ligne n’avait même pas été enregistré ! Je vais donc être convoqué au commissariat pour pouvoir déposer plainte officiellement : la police, c’est aussi une administration, avec tout ce que ça comporte. Quant à mon voleur, il a été identifié mais n’a pas encore été arrêté comme je l’avais compris à tort… Je n’ai pas fini d’en chier avec cette histoire !

 

18h : J’ai terminé le crayonné de mes planches de BD, je m’apprête déjà à dîner. Ce soir, en ville, il y avait deux événements qui ont dû attirer du monde, à savoir une conférence de Kris à la fac et un concert de Renaud à l’Arena. Je ne vais ni à l’un ni à l’autre : je connais déjà Kris qui est devenu un pote, je peux le voir quand je veux si j’ai besoin de lui poser des questions, je n’ai pas besoin d’affronter la meute des chasseurs de dédicaces pour ça. Quant à Renaud, j’ai peur d’être déçu… Même si je préférerai toujours un Renaud qui n’a plus de voix à un Biolay qui a encore la sienne !

 

Vendredi 12 avril

 

14h : Me voici au commissariat, accompagné par mon amie Marie-Hélène qui, telle Raphaëlle Coste, s’improvise mon « dé à coudre » depuis le début de cette affaire. Curieusement, on ne me demande d’ouvrir aucun des trois sacs que je porte ! On me laisse entrer sur la présentation d’une pièce d’identité ! Pourquoi prend-on plus de précaution pour visiter certaines expositions que pour entrer dans un bureau de police ? Enfin bref : nous sommes reçus par le policier chargé de l’enquête qui affirme avoir identifié formellement mon voleur qu’il mettra en garde à vue la semaine prochaine. Le domicile de ce malfaisant sera perquisitionné : si on retrouve mes dessins, ils me seront restitués ; si on ne les retrouve pas, je serai dédommagé à hauteur de la somme à laquelle je comptais les vendre. Le policier dit aussi qu’en cas de jugement, je pourrai me constituer partie civile afin de pouvoir prétendre à un dédommagement pour le préjudice moral subi. Je n’en ferai rien : je n’ai pas envie de passer les vacances au tribunal et, de toute façon, aucune somme d’argent ne pourra rattraper le déshonneur du vernissage gâché…

 

14h30 : Fidèle à ses habitudes, Marie-Hélène m’emmène à la librairie Dialogues où elle me paie un jus de fruit et un livre de mon choix : je choisis l’histoire de la Commune par Louise Michel dont je lis actuellement les Mémoires. Les écrits de la « vierge rouge » ne seront jamais au programme de l’école, que ce soit en cours de français ou en cours d’histoire, et c’est bien la preuve que c’est formidable !

 

16h15 : Me voici à la bibliothèque universitaire où doit avoir lieu la présentation d’une publication sur le travail forcé des républicains espagnols pendant la seconde guerre mondiale : une page d’histoire qui commence seulement à être étudiée avec l’intensité qu’elle mérite car, pour la France, c’est une honte nationale. C’est même doublement une honte car aucun des deux camps n’a fait mieux que l’autre : la République les a accueillis comme des rats, Vichy les a livrés pieds et poings liés aux Allemands ! Dans ce domaine au moins, au concours de l’ignominie, entre Pétain et la démocratie, c’est match nul ! La présentation prend du retard car l’une des intervenantes, qui n’a pas pu (ou voulu ?) venir à Brest, donne sa communication en visioconférence, et devinez quoi ? Et oui : la technique ne coopère pas ! Et comme toujours quand il y a un moment de flottement, les neurotypiques ont la sale manie de se mettre à papoter, ce qui a vite raison de ma patience et je finis par hurler sur ma voisine… J’aurai des choses à raconter à ma psychologue la prochaine fois que je la verrai ! 

 

17h : J’avoue que j’ignorais que le 12 avril était le jour des premières élections libres en Espagne (en 1931 pour être exact), qui ont débouché sur l’avènement de la république : au moins, comme ça, cette date m’évoquera désormais autre chose que la fermeture de l’antenne de La Cinq de Berlusconi ! J’apprends aussi que Manul Azaña, le dernier président de la république espagnole, mort en exil, a été enterré à Montauban et qu’on a finalement renoncé à transférer sa dépouille de l’autre côté des Pyrénées afin de ne pas occulter le souvenir du coup d’État et de la retirada. Bref, la France n’aura aucune excuse pour minimiser sa honte de n’avoir pas soutenu ceux qui avaient lutté pour la démocratie et la liberté en Espagne… Tant mieux ! Vive la République espagnole ! Brûlez la loque bicolore, seul le drapeau rouge, jaune et violet est légitime ! L’armée au feu et le roi au milieu ! Oui, j’écris tout ça à plus de mille kilomètres de Madrid, le cul au fond de mon fauteuil… Et après ?

 

Une vidéo que j'ai déjà consacrée à ce sujet :

 

Samedi 13 avril

 

10h30 : Je suis en manque de piles pour la pendule qui trône fièrement dans mon salon. Je passe donc à la supérette pour en acheter. Mais quand je demande des piles d’1,5 volts au caissier, il est incapable de savoir s’il en a ! Il a l’air de ne même pas comprendre de quoi je parle ! Il me demande s’il me faut des R-quelque chose ou des A-machin chouette… Comprenant que je ne tirerai rien de cet imbécile, je préfère aller voir au bureau de tabac. Décidément, Idiocracy, ce n’est pas de la science-fiction !  

 

11h : En visite chez une vieille amie, j’apprends que le parking de l’hôpital de La Cavale Blanche, lieu que je ne fréquente pas assidument (le destin m’en préserve !) est… Payant. Et que non content d’être payant, il est privé. Bien sûr, vous pouvez vous faire rembourser votre ticket de stationnement, mais saviez-vous auprès de qui ? Je vous le donne en mille : auprès de la sécurité sociale ! Cette magnifique création qui devrait être au service de l’égalité entre les citoyens face au coût des soins, ils l’ont détournée pour en faire une source d’enrichissement supplémentaire pour des margoulins ! Décidément, le pouvoir salit tout ce qu’il touche !

 

18h50 : Je quitte la MPT de Saint-Pierre où j’étais allé assister à une conférence consacrée à l’évolution du littoral de la rive droite de la Penfeld. J’en repars avec trois choses : premièrement, un gros paquet d’informations qui me permettront d’alimenter ma chronique historique pendant au moins trois semaines. Deuxièmement, sans vouloir être méchant, la conviction que je pourrais donner aux personnes qui ont pris part à cette causerie des conseils pour mener une conférence de bonne qualité formelle. Troisièmement, enfin, une certaine lassitude devant la sale manie des neurotypiques de bavarder même quand l’orateur est en train de parler : ça m’empêche de suivre le propos avec attention et je trouve ça d’une extrême incorrection vis-à-vis de la personne qui a la parole ! C’est clair ?

 

Terminons avec un projet de signalétique inspirée de celle de Télérama - mon petit hérisson est quand même plus mignon et plus expressif que cet abominable Ulysse qui râle devant une comédie de Gérard Oury et saute de joie devant un film de la mère Duras, non ? 

 

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C'est tout pour cette semaine, à la prochaine !

 


13/04/2024
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Du 30 mars au 5 avril : Pas de blagues !

Samedi 30 mars

 

18h30 : J’accueille une amie que j’avais conviée à prendre l’apéritif. Il pleut à seaux, ce qui embarrasse d’autant plus mon invitée qu’elle obligée de se garer à au moins cent mètres de mon immeuble, où le parking est rempli au-delà de ses capacités : il y a même plus de bagnoles que de locataires ! Pire, certaines empêchent complètement le déplacement des autres véhicules parqués ! Je ne serais pas étonné qu’il y ait des voitures abandonnées dans le tas. Mon amie m’arrive donc trempée comme une soupe et, comme beaucoup d’autres personnes, particulièrement lasse de ce temps infâme qui n’en finit pas. J’avoue que je commence moi-même à en avoir marre de cette situation météorologique des plus ingrates : quand je pense qu’il y a un an à la même époque on avait la sécheresse, je n’arrive pas à me consoler pour autant. Et quand je pense qu’il y a quatre ans, nous avions un soleil flamboyant dont nous ne pouvions même pas profiter parce que nous étions confinés au nom d’un virus dont on peut guérir en deux semaines, ça me donne juste envie de tout casser !  

 

Dimanche 31 mars

 

19h : Je m’étais bien promis de profiter de ce week-end pascal pour me reposer. C’est effectivement ce que j’ai fait ce matin. Mais l’envie de dessiner m’est revenue dans l’après-midi et j’ai significativement avancé sur mon programme ! Je me dis souvent qu’il faudrait repenser notre rapport au travail : commencer la journée en bourrinant dès les premières lueurs du jour alors qu’on est encore comme un nouveau-né trempé de placenta n’est peut-être pas la meilleure façon pour travailler de façon efficace et constructive. On gagnerait à laisser la motivation revenir en douceur, mais allez expliquer ça aux patrons…

 

Lundi 1er avril  

 

17h30 : Il parait que la tradition des poissons d’avril se perd dans les médias, notamment en raison de la multiplication des fake news sur Internet. C’est vrai qu’au milieu de toutes les fausses nouvelles que diffusent des imbéciles plus ou moins mal intentionnés, les canulars risquent de passer presque inaperçus ou, pire, d’être pris pour des vérités et de rester considérés comme tels malgré les démentis formels de leurs émetteurs. Il y a un peu plus d’une dizaine d’années déjà, j’avais annoncé, pour rigoler, le lancement de La Cinquante-cinq, une chaîne de télévision censée être l’héritière de La Cinq de Berlusconi : peu de gens y ont cru, heureusement… Au cours de cette journée, j’ai reçu trois messages émanant soi-disant d’entreprises avec lesquelles je n’ai jamais fait affaire et me réclamant pourtant des informations, notamment mes coordonnées bancaires. Chat échaudé craignant l’eau froide, je ne suis pas tombé dans le panneau… En tout cas, si c’étaient des blagues, c’est grave. Si c’étaient des tentatives d’escroquerie, c’est encore pire !

 

Mardi 2 avril

 

10h : Je rends visite à une amie. Celle-ci me parle de cette fameuse exposition à l’auberge de jeunesse qui m’aura surtout rapporté des cheveux blancs : mon hôtesse me raconte notamment qu’elle a eu l’occasion de discuter avec une vieille dame qui avait été intriguée par mon dessin rendant hommage à Matthieu Gallou. J’avoue que je n’avais pas soupçonné, jusqu’à présent, à quel point ce dessin pouvait détonner au milieu de mes autres dessins d’actualité : c’était effectivement l’un des rares de la collection où je délaissais toute ironie et toute critique acerbe pour rendre un hommage sincère à une personne que j’estimais. Ce dessin sortait d’ailleurs doublement du lot puisque c’était également le seul pour lequel j’avais pris la peine de faire un croquis sur le vif : je m’étais installé devant la fac Segalen pour la dessiner et je m’étais ensuite borné à l’orner d’un brassard de noir en signe de deuil… Aussi bien sur le fond que sur la forme, donc, ce dessin était vraiment différent des autres mais je ne m’en serais jamais rendu compte si mon amie ne m’avait pas rapporté cette discussion avec une visiteuse. La vieille dame avait également demandé pourquoi j’avais pris la peine de rendre hommage à ce président d’université : elle a répondu que Matthieu Gallou méritait cet honneur puisque, contrairement à la plupart des individus exerçant ou ayant exercé une telle fonction, il n’était pas obnubilé par le pouvoir. Ce qui n’est pas inexact : monsieur Gallou avait certes de l’ambition, sinon il n’en serait pas arrivé à un tel niveau de responsabilité, mais il n’était pas obsédé par sa carrière, pas au point en tout cas d’y sacrifier les valeurs auxquelles il croyait, il a même plusieurs fois bravé sa hiérarchie et le pouvoir central, par exemple quand les flics ont fait une descente dans la bibliothèque universitaire ou quand le gouvernement a décidé d’augmenter les frais d’inscription pour les étudiants étrangers… Il n’a pas fini de me manquer, cet homme-là.

 

12h : J’ai pris congé de mon amie. Je suis resté deux heures chez elle et j’en suis sorti réconforté : c’est à ça, je pense, qu’on reconnaît les vrai(e)s ami(e)s… Avant de reprendre la route pour l’auberge de jeunesse afin de décrocher mon exposition, je m’arrête dans une boulangerie pour y acheter un sandwich : il y a la queue, ce qui ne doit pas m’étonner à une heure pareille, et il y a beaucoup de jeunes, ce qui m’étonne encore moins à proximité de la cité scolaire de Kerichen. Un homme d’âge mûr rouspète parce que tous les acheteurs de sandwiches passent devant lui qui veut seulement une baguette… En attendant mon tour, je feuillette le dernier Côté Brest, que je m’étonne de trouver si tôt mais qui tombe à point pour m’aider à faire abstraction des caquètements des jeunes. Juste à côté de ma chronique historique, je découvre un article intitulé « Deux parkings payants créés au port de commerce » ! Il y en a qui vont râler… Page suivante, je lis le témoignange d’un gazier qui s’est fait implanter une puce de carte bancaire au dos de la main ! La société ressemble de plus en plus à la caricature qu’on peut en faire… « Une expérience d’humain augmenté », qu’il dit ! D’humain contrôlé, oui ! 

 

13h30 : Arrivé à l’auberge de jeunesse, j’entreprends le décrochage de mon expo : il n’y a pas eu de nouveau vol, je respire ! Le technicien de l’auberge, qui vient me donner un coup de main, en profite d’ailleurs pour m’annoncer que mon voleur a été arrêté. Contrairement à ce qu’on pourrait croire, cette nouvelle ne me fait pas plaisir : premièrement parce que je ne suis pas sûr pour autant de récupérer mes œuvres, je ne serais d’ailleurs pas étonné qu’ils les aient déjà revendues ou déposées aux pieds de quelque caïd dont il voulait se faire bien voir ; deuxièmement parce qu’il devient fort probable que je sois convoqué au commissariat ou, pire, au tribunal, autant dire deux des endroits que j’abhorre le plus sur Terre ; troisièmement, enfin, parce que, de toute façon, ça ne rattrapera en rien le désastre du vernissage… Je me demande si je pourrai tourner la page un jour. Pour l’heure, je ne sais rien du voleur si ce n’est qu’il est de Quimper : ça habite chez les bourgeois et ça vient voler chez les prolos ! Robin des Bois, c’est de la connerie : les vrais voleurs prennent aux pauvres pour donner aux riches… Non, pardon : pour REVENDRE aux riches !  

 

16h50 : Malgré le temps exécrable, j’ai décidé d’aller à pied pour mon rendez-vous en centre-ville : reprendre le bus et affronter à nouveau la foule me serait une épreuve insupportable. Maintenant, en l’état, je ne sais pas ce qui est mieux pour moi : prendre les transports en commun et risquer la crise de nerfs au milieu de la populace ou marcher à pied et avoir le moral au tapis à cause de la météo pourrie ? Je pose la question ! Je parcours les derniers mètres qui me séparent de la place de la Liberté quand je découvre que j’ai reçu un coup de fil d’une personne me rappelant que c’est aujourd’hui le décrochage de l’exposition collective installée dans la mairie et que je peux donc passer récupérer mes œuvres : ça tombe donc plutôt bien, mais ça signifie aussi qu’il va falloir que je garde sous le bras trois cadres, dont deux de grande dimension, jusqu’à mon retour à Lambé… Et il y en encore pour penser qu’être artiste consiste essentiellement à glander et à boire des coups !     

 

17h : J’ai juste le temps de faire un crochet à la mairie avant mon rendez-vous. Quand j’essaie d’ouvrir la porte, celle-ci résiste. Et pour cause : les poignées sont immobilisées par une sorte de sabot de Denver en bois ! Un cerbère s’approche et me fait signe de me calmer : il est fort probable qu’après avoir marché une heure sous la pluie, ma mine ne soit pas des plus amènes ! Il débloque la porte et l’ouvre : je crains qu’il ne m’oblige lui aussi à ouvrir ma sacoche comme m’y a déjà contraint un de ses collègues en ces mêmes lieux ; mais non, quand je lui explique que je viens seulement récupérer mes œuvres, il me laisse faire. Curieux, tout de même, que ce qui était à ce point indispensable à ma sécurité il y a à peine quinze jours soit devenu totalement dispensable entretemps ! Une preuve supplémentaire de l’inutilité et de l’incohérence de ces mesures censément destinées à nous protéger ! Si nous comptons vraiment là-dessus pour nous sauver du terrorisme islamiste, nous aurons plus vite fait de commencer tout de suite à apprendre le Coran par cœur…

 

17h15 : Me voici donc à Brest Métropole Aménagement où un responsable m’attend en vue d’un article que j’ai promis à Côté Brest sur la fameuse ligne de bus à haut niveau de service. J’en profite pour relayer auprès de ce monsieur les doléances de mes concitoyens de Lambézellec qui sont excédés et surpris par l’importance du chantier dans leur quartier : il m’explique donc que s’il y a presque autant de travaux sur le tracé de cette ligne que sur celui de la nouvelle ligne de tramway, c’est, entre autres, parce qu’on profite des travaux du nouveau réseau de transports publics pour en faire d’autres destinés à mettre la voirie aux normes. En gros, c’est l’éternelle histoire : on commence par repeindre un plafond et on s’aperçoit ensuite que tout est à remettre à neuf… Il m’assure néanmoins que cette phase de travaux sera moins longue que pour le tramway : qui vivra verra ! Quand je lui dis que je ne fais que rapporter les plaintes des riverains et que je ne suis pas le plus gêné par ces travaux car je ne suis même pas automobiliste, il me répond : « Ah, c’est bien, ça ! » Je précise aussitôt que je suis autiste et que le fait de ne pas conduire n’est pas tout à fait un choix de ma part… Mine de rien, cet échange est à lui seul symptomatique d’un clivage social : mon interlocuteur, qui m’a dit se déplacer à vélo, érige en vertu le refus de la voiture individuelle, mais il « oublie » que certaines personnes n’ont pas d’autre choix que l’automobile s’ils veulent gagner leur vie… Avant, les pauvres allaient bosser à vélo et les riches roulaient en voiture : ensuite, pour gagner plus d’argent, les riches ont poussé les pauvres à rouler en voiture eux aussi, et quand les riches se sont avisés que la voiture pourrissait la planète, ils se sont mis à rouler à vélo et ils ont reproché aux pauvres de rouler en voiture alors que ces derniers n’avaient déjà plus d’autre choix… C’est beau comme du Reiser, ce que je dis, non ?     

 

Mercredi 3 avril

 

11h30 : Petite halte au Beaj Kafé où je peux feuilleter le dernier numéro du magazine gratuit Bikini. Le contenu de cette revue est d’intérêt inégal, mais j’apprécie quand même le dossier sur la place des femmes dans les musées : instaurer des quotas n’aurait bien sûr aucun sens mais, étant donné que les artistes féminines ont longtemps été invisibilisées, on peut considérer que mettre fin à la discrimination dont elles ont été victimes en raison de leur sexe devrait suffire à rendre à leurs œuvres l’importance qui devrait leur être due et à parvenir, in fine, à un relatif équilibre entre hommes et femmes. De toute façon, j’ai beau être féministe, j’ai conscience qu’on n’élimine pas en un claquement de doigts deux mille ans de machisme occidental… Je souris en feuilletant le dossier sur les collectionneurs de vinyles qui, contrairement à ce qu’on pourrait penser, ne sont pas tous de vieux nostalgiques : il y en a aussi qui n’étaient même pas encore nés à l’époque où on annonçait la disparition définitive du microsillon au profit du CD ! Je repense à ça à chaque fois qu’on me présente la généralisation d’une nouvelle technique comme une évolution inéluctable : la prochaine fois qu’on me dira qu’il sera bientôt impossible de se passer des smartphones et les IA, je répondrai que nos grands-parents auraient été surpris d’apprendre que leurs descendants se déplaceraient en trottinette et que les avions supersoniques finiraient à la casse… Il y a enfin un article sur la pratique des photos mortuaires, devenue marginale aujourd’hui du fait de l’évolution de notre rapport à la mort : il y est dit, entre autres, qu’aujourd’hui, « on peut avoir 50 ans et n’avoir jamais bu un personne morte »[1]. J’en ai 35 et j’en ai déjà vu trois… Je ne suis définitivement pas moderne !

 

21h : Après un cours où la prof a eu la bonne idée de nous faire dessiner des chevelures, je me rends à la scène ouverte du Café de la plage. Mais j’avoue que je ne m’amuse pas vraiment : j’avais redécouvert ces soirées après le confinement et, après tous ces mois de réclusion, j’avais apprécié le petit air de liberté populaire que j’y respirais, mais aujourd’hui, je suis un peu las de cette petite salle facilement bondée où j’ai vite fait de me sentir oppressé. Le niveau des participants n’est pas formidable ce soir : le premier à passer sur scène, accompagné à la guitare par Mequi, m’a tout l’air de faire partie de ces pseudo-artistes à la limite de la clochardisation qui pourrissent bien malgré eux la réputation du quartier… Morgane et Carlos ne sont pas là, je ne vois pas grand’ monde que je connais, ce qui achève de me mettre mal à l’aise. Je ne m’attarde donc guère.

 

Voici les chevelures que j'ai dessinées pendant le cours : belle collection de scalps, n'est-ce pas ?

 

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Jeudi 4 avril

 

19h : Nouvelle scène ouverte à La Raskette, sur le port de commerce. J’ai honte de le dire, car le cadre est quand même moins populaire, mais je m’y plais mieux. Le niveau des participants est meilleur, j’y retrouve même la merveilleuse Jeanne Rose, l’enfant prodige. De surcroît, l’espace est plus aéré, on n’y est pas entassé les uns sur les autres, je n’ai donc pas la sensation d’étouffement que j’éprouvais hier au Café de la plage. Le patron paie une caricature à trois de ses employés, dont une charmante serveuse, ce qui me permet de boire sans grever mon budget et me donne de quoi faire le marché demain matin. Je pars donc satisfait, ma tristesse actuelle s’en trouve atténuée. Décidément, les soirées se suivent et ne se ressemblent pas…

Quelques croquis réalisés ce soir-là :

 

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Quelques photos, avec, en premier lieu, la merveilleuse Jeanne :

 

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Une charmante serveuse avec sa caricature réalisée par mézigue :

 

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Vendredi 5 avril

 

14h45 : Je sors d’une entrevue avec l’assistante sociale du Centre de Ressources Autisme. Celle-ci me demande une faveur avant de me laisser partir : que je lui dédicace son exemplaire de Voyage en Normalaisie. Je ne suis pas sûr qu’il soit fréquent, dans son métier, de recevoir des gens à qui l’on peut (et, surtout, veut) faire une telle demande ! Elle m’a remis, entre autres, une petite carte éditée par Asperansa, annonçant « Je suis autiste » et précisant un certain nombre de conduites atypiques que je suis susceptible d’avoir en société : je pense qu’elle risque de m’être très utile ! 

 

17h : Pause à la PAM pour écrire. Juste en face de moi, une petite fille très indocile croit malin de déplacer les chaises malgré la désapprobation réitérée de sa mère. Ce manège suffit à m’agacer et je suis à deux doigts de me lever pour l’exprimer vivement ! Je me retiens péniblement et je ne peux m’empêcher de penser que si j’avais eu la même conduite au même âge, ma mère aurait sûrement été plus sévère… Le pire, c’est que je ne peux pas reprocher son attitude à cette maman de notre temps : on déplore que les parents d’aujourd’hui attendent d’être aimés de leurs enfants et n’osent pas être trop sévères avec eux… Mais s’ils ne sont pas aimés de leurs enfants, qui d’autre va les aimer ? L’État ? Les entreprises ? Les voisins ?

 

20h30 : Après le cours de natation, je me rends au Temple du Pharaon où une scène ouverte est organisée par le Collectif Synergie. Mais la concurrence est rude en ville : un bar voisin organise lui-même une scène ouverte et il y a un concert à l’Arena. Bref, au début, Claire et moi-même sommes seuls à nous relayer sur scène : nous sommes cependant rejoints en cours de soirée par un vieux rocker et par une maman qui chante en duo avec sa charmante petite fille qui devient vite la coqueluche de la soirée. Ce n’était donc pas la soirée du siècle, mais peu importe, j’avais besoin de me changer les idées… Je n’étais pas le seul, tout le monde est plus ou moins las, en ce moment.

 

Trois croquis réalisés au cours de cette soirée :


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Une photo de la mignonne Océane (c'est son prénom) avec sa maman :

 

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23h : Je prends le bus pour rentrer. J’ai derrière moi deux jeunes filles qui caquètent et me cassent les oreilles. J’en profite pour faire une expérience : je sors la carte qui m’a été donnée par l’assistante sociale et je leur demande de parler moins fort. Et ça marche ! Je sens que ce petit bout de papier va me changer la vie…

 

C'est tout pour cette semaine, à la prochaine !



[1] Déclaration de Laurence Prod’homme, conservatrice au musée de Bretagne à Rennes, collectée et rapportée par Julien Marchand.


06/04/2024
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Du 23 au 29 mars : Poutine contre Daech : et si on les laissait s'entretuer ?

 

Pour commencer, quelques images d'un couple d'amoureux parce que j'en ai marre du climat actuel - j'ai dessiné à ma façon Déodat et Trémière, les amants du Riquet à la houppe d'Amélie Nothomb : 

 

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Samedi 23 mars

 

18h : Je quitte la librairie Dialogues plutôt satisfait : j’ai signé une dizaine d’exemplaires de Voyage en Normalaisie. Évidemment, la grande majorité des demandeurs de dédicace étaient personnellement concernés, directement ou non, pas les troubles psychologiques : il y a notamment eu une vieille dame dont le fils est dyslexique dont les camarades se moquaient en chantant « Il est gogol, il sait pas lire » ! Je me souviendrai longtemps de ce refrain idiot… Car je n’ai pas pu m’empêcher de pouffer quand elle me l’a chanté ! J’ai honte ! Je repense à ce passage de la chanson de Maëlle : « Je l’avoue le cœur gros, oui, j’ai ri avec eux ». Comme quoi il est très facile de se laisser aller à une conduite que l’on est le premier à trouver intolérable… En tout cas, au cours de cette séance de dédicaces, personne ne m’a posé de questions idiotes ni ne m’a fait de remarques déplacées, comme quoi ce n’est pas une fatalité ! On peut penser ce qu’on veut de Dialogues, mais c’est quand même une chance, dans une ville comme Brest, d’avoir encore une grande librairie qui ne soit pas la propriété d’un gros groupe et où l’on peut avoir l’opportunité de rencontrer de vrais amateurs de littérature…

 

Quelques croquis destinés à un projet - ces esquisses ne serviront finalement pas :

 

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Mardi 26 mars

 

10h30 : Après deux jours de réclusion volontaire consacrée à mon œuvre, me voici en ville où j’ai honoré un rendez-vous avec ma psychologue. C’est en sortant de cette entrevue que j’ai découvert un message de l’amie qui s’improvise mon « dé à coudre » depuis l’affaire des dessins volés : elle me convoque à 15h dans son bureau sans me dire pourquoi ! Il n’en faut pas plus pour m’inquiéter : que se passe-t-il ?

 

15h : Mort d’inquiétude, je me suis précipité au rendez-vous fixé par mon dé à coudre. Il s’avère qu’elle m’avait envoyé cette convocation en réaction à un message que j’avais laissé sur son répondeur… Il y a quinze jours ! Il avait resurgi ce matin suite à quelque caprice de la technique… En gros, nous nous sommes inquiétés l’un pour l’autre pendant quelques heures pour des prunes, par la grâce de la technologie moderne. Elle s’est sentie obligé de se confondre en excuses : je lui ai bien entendu dit que ce n’était pas de sa faute et, quand bien même, comment pourrais-je lui en vouloir de se faire du souci pour moi ? Astrid a ses faiblesses, et Raphaëlle a les siennes.

 

Mercredi 27 mars

 

9h45 : Ayant du temps avant un rendez-vous, je m’arrête au « Brest même » histoire de voir si Carole, la maîtresse de Couscous le cochon, tient toujours cet établissement. La réponse est oui : elle n’a pas trouvé de repreneur. Je ne peux que lui souhaiter bon courage car elle n’a pas la seule bistrotière à vouloir tout laisser tomber ! Je peux me tromper, mais il me semble que tenancier de bar-tabac n’est plus vraiment une carrière qui attire les jeunes… Toujours est-il que cette dame s’est déjà lancée dans une nouvelle activité : pédicure pour cochon ! Et oui : il y a de plus en plus de gens qui s’avisent que le porc est un animal intelligent, sensible et affectueux, dont la compagnie procure autant de plaisir (la différence étant de nature plutôt que de quantité) que celle d’un chien, et qui décident donc d’en adopter un comme animal de compagnie. Le problème, c’est que les cochons sont onguligrades : ça veut dire qu’ils marchent sue ce qui est l’équivalent des ongles pour les humains. Donc, si on ne leur coupe pas régulièrement les ongles, ils finissent par souffrir en marchant ! Ne riez pas, c’est la vérité : elle m’a monté une vidéo d’une truie dont elle s’est occupée, il y avait vraiment de quoi avoir de la peine pour la pauvre bête avant qu’on ne lui coupe les sabots ! De surcroît, on a tendance à l’oublier, mais le cochon, à l’instar de son cousin le sanglier, a des défenses et, si on ne les lui coupe pas, elles risquent de lui écorcher les joues. Tel est donc le double travail que Carole exécute désormais auprès des propriétaires de cochons domestiques… Dans toute la France ! Et oui, elle est vraiment la seule personne de l’hexagone à proposer cette prestation, elle n’a aucune concurrence. Je vous parie que les « vegan » vont quand même râler, arguant que ce n’est pas « naturel » de prendre soin d’un animal ! Pour ma part, je ne tiendrai pas rigueur à Carole d’avoir trouvé un filon qui lui permet de mettre à profit son amour des bêtes : il y a trop de gens qui s’appauvrissent à une tâche qui les ennuie pour que je puisse reprocher à certaines personnes de s’enrichir à une activité qui les passionne !

 

13h15 : Après avoir honoré mon rendez-vous à Saint-Marc et déjeuné sur le pouce en centre-ville, me voici dans un café à Bellevue où j’attends l’ouverture de la médiathèque. On est mercredi, jour des enfants, et je vois arriver un homme accompagné d’un garçonnet qui s’apprête déjà à prendre du bon temps sur l’un des jeux mis à la disposition des clients. J’étais déjà surpris de trouver un flipper et d’autres machines à perdre son temps (et ses sous) dans ce bar à une époque où presque tout le monde joue sur son smartphone : maintenant, je suis même content de voir un enfant s’amuser sur des engins du temps de ses parents voire de ses grands-parents ! Il y a quelques années, on disait « pendant qu’il fait ça, il est pas au bistrot », maintenant, on dirait plutôt « pendant qu’il fait ça, il est pas sur son smartphone » ! Autres temps, autres mœurs…

 

Jeudi 28 mars

 

13h30 : Je descends la rue Jean Jaurès à pied pour honorer un rendez-vous avec une sculptrice de mes amies. Je suis ainsi amené à passer devant un bar précisément au moment où il règne une certaine agitation : trois personnes sont contraintes d’unir leurs forces pour faire sortir de l’établissement un individu visiblement agressif et menaçant qui insulte tout le monde et semble même concentrer sa haine sur quelqu’un qu’il traite de « larbin ». Une fois le fauteur de troubles écarté, je pénètre dans l’estaminet et demande si on ne souhaite pas que, en tant que témoin, j’appelle la police : je me heurte au refus appuyé de celle qui semble être la patronne du bistrot. Manifestement, elle doit être habituée à ce genre d’incident… Comme quoi l’ambiance des bars du temps de mes parents n’a pas complètement disparu ! Une raison supplémentaire pour ne pas en être nostalgique…

 

16h : Je descends du tramway pour visiter un bar sis à Recouvrance où je ne désespère pas de venir exposer mes dessins. À peine sorti du véhicule, je sursaute à cause d’un type qui se sent obligé de crier aux gens qu’on change d’heure ce week-end ! Je repense à une chronique du génial François Morel où il rendait hommage à un marginal qui brandissait, sur le pont d’Asnières, un panneau souhaitant un bon week-end à tous les passants[1] : le grand humoriste soulignait à quel point ce geste était précieux dans le monde égoïste et productiviste qui est le nôtre. François Morel a raison. D’ailleurs, François Morel a presque toujours raison, même, n’en déplaise aux donneurs de leçons, quand il traite de « petite conne » une gamine qui traite une femme de guenon sous prétexte qu’elle est noire[2]. Et j’aimerais pouvoir remercier moi aussi ce marginal qui prend la peine de rappeler aux gens l’imminence du passage à l’heure d’été afin qu’ils ne soient pas pris au dépourvu. Seulement voilà : je suis hypersensible au bruit, et ma première réaction, quand quelqu’un crie à côté de moi, c’est, une fois remis de ma surprise, de soupirer et de me demander ce qui prend à ce connard de poivrot de me hurler dans les oreilles quelque chose que je sais déjà ! Ne m’en veuillez pas, monsieur Morel : je n’ai pas choisi d’être hypersensible, pas plus que ce marginal n’a lui-même choisi une destinée dont il n’est pas entièrement responsable.

 

17h10 : Je voulais prendre le bus 2a pour rentrer à Lambézellec. Il devait arriver dans cinq minutes, ça fait déjà vingt minutes que je l’attends. Il fait froid, il pleut, le vent souffle à décorner les bœufs et je suis au milieu d’une foule de personnes aussi impatientes que moi. J’ai compris : l’heure de pointe plus les déviations à n’en plus finir en raison des travaux, c’est le cocktail de la mort, il ne faut plus trop attendre des transports publics en matière de ponctualité. Je préfère reprendre le tramway puis changer à la place de Strasbourg pour prendre le bus 14. Le tramway est bondé lui aussi. Une fois arrivé au niveau de la place, le bus est déjà arrivé, mais je ne peux pas monter dedans : il faut attendre qu’il se soit positionné devant la station de départ. Le véhicule que je dois emprunter est à deux pas et je suis quand même obligé de me les geler… Tout est fait pour qu’on bien faire comprendre aux usagers des transports en commun qu’ils sont des sous-merdes ! D’ici peu, j’ai rendez-vous avec un responsable de « Mon réseau grandit » : c’est drôle, je ne le connais pas encore mais je le déteste déjà !  

 

Vendredi 29 mars

 

10h : Mes finances me le permettant, je m’achète une bouteille de cidre au marché. La crêpière à qui j’achète cette bouteille m’appelle « jeune homme »… Comment dire ? Je suis un peu surpris ! Il y a peu, j’ai pris un méchant coup de vieux en apprenant que le fils d’une de mes meilleures amies, que j’ai connu tout bébé, était déjà un bel adolescent de quatorze ans qui dépassait sa mère d’une bonne tête ! Pour ne rien arranger, dans un mois et demi, j’aurai 36 ans : dans Les liaison dangereuses, quand la Marquise de Merteuil apprend à la jeune Cécile de Volanges que l’homme qu’on lui destine à cet âge-là, la demoiselle s’exclame « C’est un grand-père» ! Je sais bien que c’était au XVIIIe siècle, mais tout de même… Si j’étais un peu plus normal, donc, je me réjouirais qu’on m’appelle encore « jeune homme »… Le problème, c’est que je déteste cette formule qui sent un peu trop la condescendance ! Est-ce que cette commerçante, au demeurant respectable, apprécierait que je l’appelle « vieille dame » ? Néanmoins, je ne proteste pas : j’ai pris tellement de baffes ces derniers temps que je n’ai même plus la force de me mettre en colère…   

 

Terminons avec quelques "grandes gueules" brestoises réalisées à la demande d'un commanditaire :

 

Emilie Kuchel :

 

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Eric Guellec :


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Jacqueline Héré :


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Karelle Hermenier :


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Karine Coz-Elleouët :


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Marion Maury :


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Patrick Appéré :


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Sandrine Perhirin :


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Sylvie Jestin :


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Yohann Nédélec :


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C'est tout pour cette semaine, à la prochaine !



[1] François MOREL, « Bon week-end » in Grâces matinales, Bouquins, Paris, 2022, pp. 233-235.

[2] François MOREL, « C’est pour qui la banane ? »,op. cit., pp. 523-525.


29/03/2024
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Du 15 au 22 mars : Sortez couverts !

 

Puisque c'est ce week-end le Sidaction, je voudrais rappeler quelques réalités essentielles. Oui, le VIH se transmet par le sperme et par le sang, il ne faut donc pas avoir peur de serrer la main à quelqu'un ou même de l'embrasser. Oui, la recherche a progressé depuis les années 1980. Oui, on peut être séropositif et ne pas être forcément condamné. Oui, on peut aujourd'hui être porteur du virus du Sida et bénéficier de traitements qui permettent d'avoir une sexualité "normale" sans transmettre cette saloperie à son partenaire. MAIS encore faut-il être dépisté. MAIS on ne guérit toujours pas du Sida. MAIS il n'existe pas non plus de vaccin. DONC : éclatez-vous, amusez-vous, baisez à couilles rabattues, enfilez-vous par tous les trous, emmanchez-vous de tous les côtés MAIS mettez des capotes. Vous avez (presque) de la chance, il en existe aujourd'hui des extra-fins qu'on sent à peine, ça ne diminue pas le plaisir, ça peut être un prétexte pour mieux connaître son corps et celui de son partenaire, ça évite même les grossesses indésirées - je le précise car j'ai cru comprendre que se reproduire comme des lapins n'était pas non plus un objectif poursuivi par la jeunesse d'aujourd'hui. Bref : protégez-vous, faites-vous dépister si vous avez vraiment trop peur, mais n'oubliez pas de prendre votre pied et, si vous connaissez quelqu'un qui souffre du Sida, soutenez-le : la solidarité n'est pas un facteur de transmission...

 

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Le monument utilisé sur cette image est la Consulaire, un canon pris aux Algériens en 1830 et exposé comme trophée au beau milieu de la base navale de Brest - on a dit beaucoup de bêtises à son sujet, je vous encourage à consulter mon article sur le sujet pour distinguer le vrai du faux


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Ce dessin m'a été inspiré par un commentaire d'une personne qui trouvait que mon hérisson avait un nez phallique ! Vous en pensez quoi, vous ?

 

Après ce message de prévention, revenons à nos moutons :

Vendredi 15 mars

 

10h30 : Bref retour à la fac Segalen où j’ai rendez-vous avec une personne qui peut m’aider dans une démarche administrative désagréable – un pléonasme, excusez-moi. J’en profite pour revoir une vieille amie qui co-organise une journée d’étude : cédant à ma curiosité habituelle, je reste pour écouter deux communications. Il est en grande partie question des violences faites aux femmes, ce qui m’inspire deux dessins : je renoue ainsi, l’espace d’un instant, avec l’époque où je faisais le dessinateur dans à peu près toutes les manifestations scientifiques organisées à la faculté. Ce n’est pas très différent de ce que je fais lors des journées de psychomotricité, sauf que là, c’est exceptionnellement gratuit.

Les dessins en question :

 

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Deux croquis sur le vif :

 

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 Samedi 16 mars

 

18h : Tout en tenant mon stand de caricaturiste à la PAM en compagnie de deux autres créatrices, je lis les chroniques de François Morel éditées dans la collection Bouquins : monsieur Morel fait le chroniqueur sur France Inter depuis le début des années 2000 et force est de constater qu’en dépit de tout ce qu’on a peut dire sur la prescience dont parfois montre les humoristes, même le meilleur d’entre eux peut se tromper – ce qui est bien excusable, le but d’un humoriste étant de faire rire ou sourire, parfois réfléchir, mais jamais de prédire l’avenir.  Il n’empêche que rétrospectivement, ça donne lieu à des moments d’humour involontaire ! Ainsi, il est difficile de ne pas ricaner aujourd’hui quand on lit, dans une chronique datée du début de ce siècle, qu’une preuve de l’anticonformisme de Jean-Luc Hees est le fait qu’il tutoie Philippe Val ! À l’époque, ce n’était qu’une petite pointe d’ironie, mais aujourd’hui, c’est carrément devenu une antiphrase ! Encore que… On peut très bien envisager comme de l’anticonformisme le fait de prétendre défendre la liberté d’expression tout en virant des humoristes à tour de bras ! Mais faut-il pour autant persister reconnaître Philippe Val comme un anticonformiste ? Oui, à condition d’insister sur la troisième syllabe !  

 

Dimanche 17 mars

 

16h30 : Je me réveille ; j’ai fait la sieste pendant plus de deux heures ! Même un dimanche, ça ne m’était jamais arrivé ! Les derniers événements m’ont véritablement épuisé, comme quoi la fatigabilité des autistes n’est pas une légende. Si Dieu existe et n’a vraiment rien fait le dimanche, alors il faut croire que Dieu est autiste ! Ce qui suffirait peut-être à expliquer pourquoi si peu de gens l’ont vu…

 

Lundi 18 mars

 

10h30 : Avant un rendez-vous en ville avec un ami, je fais une pause-café à la PAM. En attendant d’être servi, je risque un œil sur un quotidien. Comme prévu, je n’apprends rien de passionnant : cette saleté de guerre continue en Ukraine, notre président joue les irréductibles Gaulois face à ce salaud de Poutine, Bruno Le Maire se prépare déjà pour la curée de l’après-Macron, Mélenchon et Glucksmann remettent l’union de la gauche, qui attend depuis déjà cinquante ans, à après les européennes dont tout le monde se fout… Tout ceci est dérisoire ! L’Univers est probablement infini et ces crétins persistent à convoiter des lambeaux de pouvoir sur une planète minuscule ! La vie serait plus douce et moins absurde si nous avions tous davantage conscience de notre insignifiance…     

 

12h : Encore un trait d’humour involontaire de François Morel : en 2002, il intronisait le jeune Vincent Delerm comme « déjà indispensable » ! 22 ans plus tard, force est de constater qu’on se passe fort bien de cet individu… Et de la plupart des autres représentants de ce qu’on a appelé la « nouvelle scène » française ! J’ai toujours eu tendance à penser que si l’avènement médiatique de cette « nouvelle scène » avait été presque concomitant avec le retour de la droite au pouvoir, ce n’était pas dû au hasard mais bien à la méfiance que Chirac, Raffarin, Sarkozy et les autres ont toujours nourri envers les musiques dites « de jeunes »… En règle générale, plus la musique qu’on entend dans un pays est chiante, plus la façon dont le pouvoir gère ledit pays l’est aussi ! Et force est de constater que même si Delerm-le-gant-de-toilette est en passe de tomber dans l’oubli, la musique qu’on nous passe aujourd’hui n’est pas beaucoup plus dansante…

 

Mardi 19 mars

 

12h : Nouveau passage sur Transistoc’h (anciennement Radio Évasion) : je passe pour parler de mon actualité mais, surtout, pour raconter le siège de Brest. Ce n’est pas que ça m’enchante, le sujet est rebattu : fort heureusement, je suis accompagné d’une vieille amie et je me sens soutenu. Le fait que cette personne chère à mon cœur soit une très belle femme n’est pas étranger à mon surcroît de motivation ! Je pourrai dire que j’avais une cheerleader pour me soutenir ! Quoi ? Le cheerleading est sexiste ? Pas d’accord ! Une cheerleader, une vraie, ce n’est pas une vulgaire pom-pom-girl : c’est à la fois une gymnaste, une danseuse et une acrobate, c’est dont une athlète accomplie dont les performances méritent d’être mises en avant au même titre que celles de ces brontosaures velus qui courent après un ballon, rond ou ovale ! Si c’est vraiment à ce point dégradant pour l’image de la femme, on n’est pas obligé d’habiller les cheerleaders de façon trop révélatrice ! Et pourquoi ne pas créer des cheerleaders masculins, histoire de rééquilibrer ? De toute façon, ce que je veux dire, c’est que l’égalité, ça doit consister à donner le même plaisir à tout le monde, pas à baisser celui des uns pour qu’il soit aussi réduit que celui des autres ! J’espère que les féministes aspirent à être aussi bien payées que les hommes, pas à ce que ces derniers le soient moins…  

 

Vous pouvez écouter en replay cette interview en deux parties :

Partie 1 sur le siège de Brest

Partie 2 sur mon actualité

Mercredi 20 mars

 

20h30 : Après le cours du soir, je dîne au Biorek où je retrouve une photographe d’âge mûr avec laquelle j’avais sympathisé. Je le sais familière de l’établissement, c’est donc typiquement ce qu’Astrid Nielsen appellerait un « imprévu prévisible ». Cette rencontre est d’autant plus agréable que je ne suis toujours pas remis des récents événements : je supporte encore moins bien que d’habitude les contrariétés, je panique pour un rien, et chaque matin, je me demande ce que cette chienne de vie va encore inventer pour m’embêter… Je n’ai jamais été optimiste, et je n’arrive pas à trouver de raisons de l’être.

 

Quelques travaux réalisés dans le cadre du cours du soir : les traditionnels croquis de nu...

 

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Deux "dessins automatiques" inspirés du surréalisme :

 

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Jeudi 21 mars

 

10h : C’est le printemps, paraît-il. Peu me chaut, j’ai décidé d’avancer sérieusement sur un projet dans lequel je place beaucoup d’espoir. Je n’ai plus d’excuses, à présent. J’ai cependant un mal de chien à me mettre au travail : ça n’a jamais été facile, mais je ne suis toujours pas remis de mes dernières mésaventures. Pour ne rien arranger, je ne suis pas seul maître de ce projet sur lequel je collabore avec une autre personne, je croise donc les doigts pour qu’elle soit satisfaite de ce que je vais lui présenter… Naturellement, c’est une façon de parler : si je croise vraiment les doigts, je vais avoir du mal à tenir mon crayon !  

 

Un croquis préparatoire pour le projet en question :

 

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Vendredi 22 mars

 

13h30 : En jetant un œil sur la une de Ouest France, j’apprends la mort de Frédéric Mitterrand. J’ai toujours eu tendance à le classer dans le cercle des cabotins bavards, pompeurs, prétentieux et chiants, au même titre que Fabrice Luchini, Nelson Monfort et Stéphane Bern. Néanmoins, je ne lui reprocherai pas d’avoir tenté de relever un peu le niveau culturel de la télévision française : après Sylvain Augier, c’est encore une lueur d’intelligence qui s’éteint dans un paysage de plus en plus obscur… Je ne lui reprocherai pas non d’avoir été ministre de Sarkozy : il n’aura pas été le plus nuisible des membres de ce gouvernement (la concurrence était de toute façon trop rude !) et, comme l’avait rappelé Siné à l’époque, ce serait lui faire un mauvais procès car, contrairement à son oncle qui a maintes fois retourné sa veste (il devait avoir un bon tailleur vu qu’elle n’a quasiment jamais craqué), il a toujours été de droite et ne s’en est jamais caché, il est donc resté fidèle à ses valeurs de ce point de vue-là. Quant au fait qu’il ait pris la défense de chanteurs qui ne le méritaient pas vraiment et ait goûté en Thaïlande à des plaisir peur recommandables… Heu… Joker !

 

14h30 : Passage à l’hôtel de ville pour voir la fameuse exposition « Pluie de toiles » à laquelle j’ai été invité par participer. À peine entré, je suis interpellé par un cerbère qui demande à vérifier le contenu de mes sacs : sans oser répondre que ce n’est pas la façon la plus respectueuse d’accueillir un artiste, je lui dis qu’il n’y a pas de problème et qu’il peut les ouvrir. Il me répond qu’il n’en a pas le droit et que c’est à moi de le faire ! Je ne m’habituerai jamais à ça… Je ne peux m’empêcher de me gendarmer, mais ce zorglhomme n’en démord pas. Je finis par céder, de mauvaise grâce, tant la situation est absurde ! Une petite dame m’aborde en me disant que c’est pour « ma sécurité » ! Ma sécurité ! En moins d’un an, je me suis fait dépouiller deux fois, j’ai failli être victime d’une arnaque, et on me dit que c’est pour ma sécurité que je dois faire le beau devant un flic raté ! J’en rirais si je le pouvais encore ! Je fais le tour de l’exposition : c’est peut-être ma mauvaise humeur qui m’empêche d’apprécier pleinement, mais je ne vois rien de très original. Après avoir pris une photo de mes propres œuvres pour le souvenir, j’aborde les dames de l’accueil, espérant avoir l’opportunité d’échanger avec des personnes un peu éclairées : j’en suis pour mes frais, elles ne se rappellent même pas de ce que j’expose ! Comme elles ont été témoins de mon esclandre, j’essaie de les convaincre de l’inutilité du cerbère de l’entrée en leur expliquant qu’il est totalement improbable qu’une personne vraiment dangereuse obéisse gentiment à ses injonctions et que si un givré armé jusqu’aux dents entrait ici, il aurait déjà flingué tout le monde avant que le gorille n'ait pu lui demander quoi que ce soit ! Je ne récolte qu’une expression apeurée sur le visage de mes interlocutrices… J’espérais rencontrer des amateurs d’art, je n’ai vu que le public de Charles Villeneuve ! N’hésitez quand même pas à aller visiter l’expo et à voter pour mes œuvres afin que j’aie une chance de remporter le prix du public…   

 

Une photo de mes œuvres exposées - je me passe de vos commentaire sur le tableau représentant le Père Noël qui apparait à l'arrière-plan :

 

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C'est tout pour cette semaine, à la prochaine !

 

 


22/03/2024
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Du 9 au 14 mars : lectures, cimetière, féminisme et crises de nerfs

 

Commençons par un peu de promotion pour un événement auquel je vous donne rendez-vous pour demain :

 

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Samedi 9 mars

 

10h : Je retourne à l’Auberge de jeunesse, porteur de quatre dessins… Pour remplacer ceux qui ont été dérobés. La perte de certaines de mes œuvres, en tant que telle, je m’en fiche presque : j’ai chez moi tellement d’originaux que si j’arrivais à les revendre tous pour un euro pièce, je pourrais presque arrêter de travailler pendant au moins un an. Non, ce que je ne digère pas, c’est que ça a gâché mon vernissage : j’ai été averti trop tard pour pouvoir remplacer les dessins manquants avant l’arrivée des invités et, surtout, BEAUCOUP trop tard pour que je puisse faire bonne figure devant ces derniers. Bref, j’étais venu comme à Austerlitz, j’en suis reparti comme à Waterloo… Non, même pas : comme à Sedan[1] ! Et ça, c’est irrattrapable ! Je me sens comme une jeune femme amoureuse qui aurait été larguée le jour de son mariage…

 

 

13h : Fraîchement rentré, je termine la lecture de l’anthologie des nécrologies de Cavanna, intitulée sobrement Le dernier qui restera se tapera toutes les veuves d’après le titre que le grand homme avait lui-même donné, avec sa délicatesse coutumière, à son article sur la mort de son fils spirituel, Reiser. Le fondateur de Charlie Hebdo n’était pas (et ne pouvait pas être) un journaliste comme les autres : il ne se privait pas dire franchement ce qu’il pensait d’un défunt, même et surtout s’il le détestait ! L’ouvrage est d’ailleurs instructif à plus d’un titre : j’avoue que j’ignorais, avant de lire l’article qui lui a été consacré, qui était Abel Gance ! Et je ne suis pas certain que mon cas soit isolé, tant le cinéma de ce réalisateur paraît dépassé aujourd’hui, aussi bien sur le fond que dans la forme. Le fait que Cavanna, qui fut, avec Albert Camus, l’un des rares très grands esprits dont le destin fit don à la France du XXe siècle, jugeât néanmoins opportun de consacrer son temps et son talent à traiter d’individus qui ont finalement sombré dans un oubli relatif (voire total) est tout de même révélateur de la longévité des notoriétés et devrait faire réfléchir ceux qui, encore aujourd’hui, font des pieds et des mains pour laisser un nom dans l’histoire ! Sic transit gloria mundi, ainsi passe la gloire du monde, dit-on, paraît-il, à tout Pape fraîchement intronisé pour qu’il se rappelle que le succès rencontré ici-bas est voué à être éphémère : c’est bien une des rares fois où les curés ne disent pas de conneries ! J’avoue que j’ignorais aussi que Cavanna avait eu une petite-fille morte d’une overdose d’héroïne : l’occasion a dû être trop belle pour la presse pourrie ! De fait, Virginie Vernay me confirmera peu après que ce salaud de Pauwels ne s’est pas privé d’en rajouter dans les colonnes du Figaro… Elle me dira aussi que Cavanna avait justement saisi l’occasion pour dénoncer les méfaits de la drogue : c’était courageux de sa part, car ce genre de discours ne risquait pas d’être populaire auprès d’une certaine frange du public de Charlie Hebdo ! Je me souviens des reproches que Renaud avait encaissés après avoir sorti « La blanche » et « P’tite conne »… De façon générale, il me semble que la drogue est un sujet embarrassant pour les milieux libertaires : on ne veut pas adopter la même attitude que le pouvoir que l’on prétend contester, mais comment nier la dangerosité des drogues dures ? J’ai moi-même pu constater cet embarras quand j’ai participé à une scène ouverte organisée dans la défunte salle de l’Avenir, dont les responsables rechignaient à expulser un type sous l’emprise de la cocaïne alors qu’il perturbait l’événement et m’empêchaient de déclamer… Enfin bref : je ne peux que recommander la lecture de ce livre qui permet de réviser l’histoire du XXe siècle avec humour tout en donnant un bel aperçu de la pensée de Cavanna, toujours tranchée mais jamais bornée – il suffit de lire les nécrologies de De Gaulle et de Mitterrand pour s’en rendre compte.

 

Dimanche 10 mars : Sharon Stone a 66 ans

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15h : Visite guidée du cimetière de Kerfautras. Une telle visite s’accorde bien à mon état d’esprit actuel ! J’ignorais qu’on y trouvait le plus grand carré militaire installé dans un cimetière civil en France : ce n’est pas la première fois que j’entends parler d’un record détenu par la ville de Brest et dont on ne parle cependant jamais ! Je ne dis pas qu’il faudrait en être fier, mais ça constitue au moins une curiosité qui prouve que ma ville bien-aimée est encore plus étrange qu’on ne le croit…

 

16h : Quand on parle de cimetière militaire, on pense spontanément à des croix blanches toutes identiques, alignées avec une régularité exemplaire, rien que du propre, du carré et du rationnel. C’est loin d’être le cas à Kerfautras pour deux raisons : premièrement, ce n’est qu’en 1986 qu’il a décidé de rapatrier toutes les dépouilles militaires dans le carré qui leur est destiné et il subsiste encore quelques soldats enterrés parmi les civils dans leurs caveaux de famille. Deuxièmement, le port de Brest étant un véritable carrefour du monde, surtout en période de guerre, les nationalités les plus diverses coexistent dans le carré militaire : non seulement des Français de métropole mais aussi des soldats originaires des colonies dont beaucoup sont signalés par des stèles musulmanes (je n’ai pas osé demander s’il arrivait que certaines de ces tombes soient profanées…), ainsi que des militaires du Commonwealth, des Russes, des Portugais, des Japonais et même des Allemands et un Américain ! Pourquoi un seul Américain ? Parce que tous les soldats américains morts à Brest de la grippe espagnole ont fini par être rapatriés aux États-Unis, sauf celui-ci qui était quaker, et le déplacement de sa dépouille était contraire aux règles de sa communauté ! Au moins la connerie des religieux aura-t-elle permis à Brest de bénéficier d’une curiosité…

 

16h15 : C’est décidément le bordel, dans ce carré militaire : je remarque que sur l’une des tombes musulmanes, il est indiqué que le soldat est mort… En 1967 ! Cinq ans après la guerre d’Algérie ! Quand je le signale à la guide, elle me répond qu’elle n’a pas d’explication et qu’il peut s’agir d’une erreur ! Une rombière me dit « Heureusement que tout n’est pas parfait, sinon ce serait ennuyeux ! » Agacé par ce lieu commun, je lui réponds : « Vous n’en savez rien puisque vous n’avez jamais pu voir de monde parfait ». Elle le prend assez mal, preuve s’il en est que les braves gens n’aiment pas que l’on bouscule leurs idées reçues ! Je le déplore…

 

Quelques photos prises dans le cimetière :

 

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Lundi 11 mars

 

17h30 : Je récapitule : j’ai des boutons sur la gueule, ma note de téléphone est en train d’exploser, tout ce que j’entreprends pour promouvoir mon travail foire lamentablement, je suis en train de perdre tous mes amis et il me faut encore déposer plainte à la police pour le larcin dont j’ai récemment été victime. Il y a sûrement des gens plus malheureux que moi sur Terre, mais je suis sur le point de craquer…

 

Mardi 12 mars

 

13h30 : Pause dans un café avec une femme qui, telle Lola Dewaere dans Astrid et Raphaëlle, s’improvise mon « dé à coudre » dans l’épreuve que je traverse. Dans un accès d’accablement, je ne peux m’empêcher de pousser un cri : la patronne me prie de ne pas recommencer, par égard pour son jeune serveur… Qui est autiste ! Il ne m’en faut pas davantage pour que je présente mes excuses à ce garçon. J’imagine qu’il a dû en baver dans son enfance, d’autant qu’il est… Roux. Ça, au moins, j’y ai échappé ! La rousseur peut être un atout pour une femme, mais ça reste un handicap social pour un homme : après tout, il faut bien qu’il y ait au moins un domaine pour lequel les femmes sont favorisées…

 

15h : Je termine la lecture du livre de Jacques Diament dans lequel il témoigne sur ses vingt années passées à la tête de Fluide Glacial. Au cas où vous ne le sauriez pas, Jacques Diament avait été pour Fluide ce qu’André Rousselet avait été pour Canal+, c’est-à-dire un homme à la fois assez fou pour s’investir dans le projet et assez sérieux pour lui permettre de se développer et de subsister dans un monde où tout est prévu pour éliminer ce qui ressemble de près ou de loin à de la fantaisie. Il a su prendre, au moment où il le fallait, des décisions impopulaires qui ont fait de lui l’homme le plus détesté du journal, mais c’est à ce prix que Fluide Glacial a pu se doter, dès ses toutes premières années d’existence, d’un mode de fonctionnement grâce auquel il continue à paraître encore aujourd’hui tout en restant à peu près fidèle à l’esprit de ses origines alors que la plupart des magazines de BD fondés à l’époque se sont cassé la gueule… Je ne peux donc que recommander la lecture de son livre bourré d’anecdotes savoureuses : et puis il écrit bien, cet emmerdeur de génie !

 

Mercredi 13 mars

 

9h15 : Au moment de déposer mes œuvres à l’exposition Pluie de Toiles qui se tiendra dans le hall d’honneur de la mairie, je risque un œil sur le journal : apparemment, l’Assemblée a massivement approuvé le soutien de la France à l’Ukraine… Sans le RN et LFI. Rien d’étonnant : cette question est embarrassante pour la Le Pen et pour Mélenchon qui ont tous deux soutenu Poutine avant qu’il ne franchisse le rubicond ! Avec une opposition pareille, je pense que Macron peut dormir tranquille ! Et ça ne me fait pas plaisir…

 

10h : Descendant du tram, je remarque une affiche incitant à s’engager dans la Marine : elle présente la photo d’un scaphandrier accompagnée de l’accroche « Si vous préférez vous plonger dans des dossiers, c’est votre affaire » (je cite de mémoire). Visiblement, l’armée a compris que les jeunes aspirent à ne pas avoir la même vie de merde que leurs parents et leur fait miroiter la perspective d’une vie professionnelle épanouissante. Seulement voilà : ayant un ami dans la marine, je peux attester que les besoins de cette institution ne se limitent pas à ces tâches exaltantes ! Si vous vous rendez au bureau de recrutement, la probabilité pour que vous vous retrouviez derrière un bureau à vous occuper de la paperasse reste élevé ! On dit que l’armée est une grande famille : je peux témoigner que c’est aussi et surtout une administration avec tout ce que ça comporte… Enfin, je vous aurai prévenus ! Je ne vais pas en rajouter, on va encore m’accuser d’antimilitarisme et je n’aurai pas d’arguments pour réfuter…

 

Jeudi 14 mars

 

18h : Je me décide enfin à visionner la mini-série Cherchez la femme sur la chaîne YouTube des programmes courts d’Arte : elle est consacrée aux femmes oubliées de l’histoire, celles que les hommes ont tenté (non sans succès) d’invisibiliser. On aurait pu se passer de parler de Lilith qui n’est qu’une légende, mais bon, ça n’enlève rien à l’intérêt de cette série ni à la pertinence de son propos : saviez-vous qu’un tiers des samouraïs étaient des femmes, qu’il est attesté qu’il y a eu des guerrières chez les vikings et que le Monopoly est un plagiat d’un jeu inventé par une certaine Elizabeth Magie ? Non ? Et bien je ne peux pas vous jeter la pierre : j’avoue à ma grande honte qu’à part la pharaonne Hatchepsout, Christine de Pizan, Alice Guy et madame Einstein, j’ignorais tout de la plupart de ces femmes qui ont pourtant joué un rôle capital dans l’histoire humaine ! Comme quoi l’invisibilisation des femmes est efficace et semble même être systématique dans le domaine où on l’attendrait le moins : les sciences ! En fait, ça s’explique facilement : le monde scientifique est tellement mystifié que le public laisse travailler les chercheurs dans la plus grande sérénité, sans même imaginer que cette opacité permet aux savants, qui ne sont jamais que des hommes, de laisser libres cours à toutes leurs mesquineries ! Car oui, être un brillant scientifique ne met pas à l’abri d’être un gros macho qui s’approprie sans vergogne la découverte d’une femme sans même la citer… Ne vous laissez plus faire, les filles ! Visez les couilles, ça leur fait plus mal que le cerveau !    



[1] Lieu de la débâcle française de 1870 qui coûta son trône à Napoléon III. Oui, le neveu de l’autre, celui que Victor Hugo a surnommé « le petit », Badinguet, quoi !


15/03/2024
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